Les attelages de chiens de traîneau

La composition d’un attelage de chiens de traîneau

Des chiens de traîneau sur une colline enneigée

Le nombre de chiens dans un attelage varie selon la race utilisée, la stratégie du musher, et bien sûr le type de course.

 

Dans les courses de longue distance (Iditarod, Yukon Quest, La Grande Odyssée Savoie Mont Blanc, etc.), les attelages sont composés d’au moins 10 chiens au départ de l’épreuve. Dans les courses de vitesse, en fonction de la catégorie, l’attelage compte généralement de 2 à 9 chiens, et même plus dans certaines catégories. Le ski joëring utilise pour sa part un ou deux chiens, et la pulka peut être attelée à un, deux ou trois chiens, selon les courses.

 

Le sexe n’a pas d’importance au sein d’un attelage. On y trouve indifféremment des mâles et des femelles, selon la préférence du musher, la personnalité des chiens et les périodes de chaleurs. C’est le musher qui définit la composition de son attelage. Certains préfèrent ainsi travailler avec des femelles : moins puissantes mais plus légères, elles sont généralement bien représentées dans les grands attelages.

La gestion de l’attelage pendant la course

Un maître et son chien sortent d'une tente

En cours d’épreuve, le musher peut modifier la composition de son attelage, mais les règles varient selon les pays et les épreuves.

 

Ainsi, les règlements des grandes courses nord-américaines autorisent les mushers à « dropper » (retirer de l’attelage) des chiens, mais pas à les remplacer, alors que la Fédération française des Sports de Traîneau (FFST) leur permet de réduire leur attelage et de remplacer des chiens après la première manche, sous réserve toutefois d’en aligner toujours un certain nombre minimum, qui diffère selon la catégorie.

 

Des chiens de traîneau à l'arrêt

Par ailleurs, le règlement de la Grande Odyssée Savoie Mont Blanc, par exemple, stipule que les mushers disposent d’un « pool » de 12 à 14 chiens dans la catégorie Open et de 8 dans la catégorie Limited, parmi lesquels des retraits et des remplacements sont possibles. Avant chaque étape, en fonction de l’épreuve du jour et de l’état de ses troupes, chaque musher choisit les chiens utilisés, sous réserve toutefois de respecter le nombre minimum et maximum de la catégorie dans laquelle il concourt. Ainsi, dans la catégorie Open, le minimum est de 6 chiens attelés au départ de chaque épreuve, et 5 à l’arrivée. Dans la catégorie Limited, il faut respectivement au moins 5 et 4 chiens.

 

Des chiens de traîneau blessées et transportés
© Hannah Borgerding

En revanche, et ceci est valable pour toutes les courses, si un chien doit être retiré entre deux points de contrôle, soit parce qu’il s’est blessé, soit parce qu’il est trop fatigué pour terminer l’étape, il est transporté dans le traîneau, dans le sac à chien prévu à cet effet, jusqu’au prochain point de contrôle. Sur la Grande Odyssée et la Yukon Quest, il y a également sur le parcours quatre points de dépose, en plus des points de contrôle. Un chien peut y être laissé (attaché) en attendant qu’on vienne le récupérer.

 

Un camion transportant des chiens de traîneau
© Hannah Borgerding

C’est généralement le « handler » qui se charge de transférer à l’étape suivante les chiens non utilisés pendant une étape donnée, mais aussi le cas échéant de récupérer les chiens « droppés » en cours d’épreuve. En plus de gérer les chiens non attelés, cet assistant du musher, qui souvent finit par devenir à son tour musher après avoir accumulé suffisamment d’expérience, est également présent à tous les points de contrôle, où il a pour rôle de changer les chiens de place au sein de l’attelage, ou encore de démêler les lignes. En revanche, les soins (repas, massages des chiens, etc.) sont assurés par le musher lui-même.

 

Il convient de noter que l’organisation de la course ne fournit pas vraiment d’aide logistique aux mushers et handlers pour le transport des chiens non attelés. C’est donc à eux qu’il revient de disposer de camions avec des boxes adaptés au transport de chiens, et qui doivent répondre à certaines normes.

 

De façon générale, les aspects logistiques des courses contribuent au fait que cette passion est le plus souvent pratiquée à perte, voire peut s’avérer être un véritable gouffre financier.

Le fonctionnement d’un attelage

Les positions des chiens dans un attelage

Il y a jusqu’à quatre positions dans un attelage. Tous les chiens peuvent être attelés seul ou en tandem, selon la taille de l’attelage et le choix du musher, mais la plupart du temps c’est en tandem.

1. Les « leaders »

Des Huskys tirent un traineau

Ce sont les chiens de tête. Le musher choisit les chiens les plus rapides, intelligents et obéissants, car ce sont eux qui répondent directement aux ordres. On estime qu’ils retiennent environ 50 mots. On peut trouver à ce poste des mâles comme des femelles, mais ces dernières sont majoritaires.

 

Contrairement à ce l’on pourrait penser, ce n’est pas forcément le chien dominant de la meute qui est leader. Un chien est leader parce qu’il a les qualités que nécessitent ce rôle (obéissance, vitesse, intelligence), et non parce qu’il domine la meute. De fait, le seul dominant de l’attelage, c’est le musher, qui doit être obéi au doigt et à l’œil pour que l’ensemble fonctionne.

2. Les « swing dogs »

Des chiens de traîneau courent sur la piste

Ils sont derrière les chiens de tête, donnent le rythme et secondent les leaders pour diriger l’attelage dans les courbes, les virages, et pour les changements de direction. Ils assument également leur rôle en cas de défaillance ou de doute.

3. Les « team dogs »

Des chiens de traîneau courent sur la neige

C’est le gros de la troupe, qui se trouve au centre de l’attelage. Ce sont les « moteurs » du traîneau, et c’est là que l’on place les jeunes chiens, de manière à ce qu’ils apprennent le métier aux côtés des plus expérimentés.

4. Les « wheel dogs »

Des chiens de traîneau de dos

Ils sont en dernière position, c’est-à-dire juste devant le traîneau. Ce sont les chiens les plus grands et les plus forts de l’attelage (en principe des mâles), car ce sont eux qui « arrachent » le traîneau.

 

Un attelage de chiens de traîneau au début d'une course

En plus des qualités physiques et mentales des chiens, leur complicité entre en ligne de compte : on évite de mettre en tandem deux chiens qui ne s’aiment pas, mais on associe volontiers deux individus qui s’apprécient.

 

Par ailleurs, les chiens sont disposés en éventail. Ainsi, si l’un d’eux tombe dans une crevasse, il n’entraîne pas les autres dans sa chute.

 

Enfin, ils peuvent à tout moment changer de position à l’intérieur de l’attelage. Cela leur permet d’acquérir de nouvelles compétences et de s’entraîner sur d’autres postes. C’est aussi un moyen pour le musher de récompenser certains, car être en tête est une source de fierté.

La ligne de trait

Un attelage de chiens de traîneau sur un sentier enneigé

Tous les chiens de l'attelage portent un collier et un harnais. Chacun a son propre harnais pour chien, adapté à son anatomie et rembourré pour ne pas le blesser. Cet accessoire peut être Xback ou Hback, c’est-à-dire qu’il forme sur son dois soit un X, soit un H. Il va du cou et du torse à la queue.

 

Plusieurs câbles relient les chiens au traîneau :

  • la ligne de queue est attachée au harnais au niveau de la queue du chien, et permet la traction ;
  • la ligne de cou est attachée au collier et relie le chien à la ligne centrale, pour éviter qu’il ne s’en éloigne trop ;
  • la ligne centrale est le point d’attache des deux autres lignes. Elle passe entre les deux chiens associés en tandem, et sert de structure à l’attelage.

 

L’ensemble des lignes s’appelle la ligne de trait. Tous les éléments sont raccordés entre eux avec des mousquetons, de manière à faciliter le retrait ou l’ajout d’un chien.

 

En plus de ces éléments, un amortisseur se trouve entre la ligne de trait et le traîneau. En matière élastique, il amortit les chocs et protège les reins et la colonne vertébrale des « wheel dogs », c'est-à-dire ceux qui sont près du traîneau.

Pour un repos bien mérité : le « stake out »

Des chien de traîneau au repos sur de la paille

Lorsque les attelages terminent une étape, les chiens sont gardés attachés à un piquet dans un espace qui leur est réservé : le « stake out ». Cela permet d’éviter tout risque de fugue des chiens s’ils sentent une piste (beaucoup d’entre eux ont gardé un instinct de chasse important) mais aussi toute bagarre entre chiens, qu’elle mette en scène des individus du même attelage ou de plusieurs attelages différents.

 

C’est dans le stake out que les chiens mangent et boivent, se reposent et reçoivent la visite de contrôle quotidienne des vétérinaires mandatés par l’organisation. C’est là aussi que le musher prend soin d’eux ou encore qu’on garde ceux qui ont été « droppés » au cours de l’étape.

 

Les colliers étrangleurs et les muselières sont interdits dans ces espaces, comme dans tous les espaces où peuvent se trouver les chiens.

Des chiens sous surveillance

Deux chiens de traîneau assis dans la neige

Tous les chiens participant à une course sont marqués, généralement au moyen d’une puce électronique. Cela permet de toujours savoir en temps réel où se trouvent les équipages, ce qui est particulièrement utile pour les grandes courses par étapes avec de longues distances entre les points de contrôle. Ainsi, en cas de problème, une équipe de secours peut se rendre rapidement sur place.

 

Cela permet aussi d’éviter les fraudes, comme le remplacement d’un chien en cours d’étape.

L’alimentation des chiens de traîneau

Des chiens de traîneau se reposent et s'abreuvent
© Hannah Borgerding

Les chiens de traîneau sont des athlètes de très haut niveau, et ont donc besoin d’une alimentation adaptée. Ils doivent fournir des efforts considérables, dans des conditions climatiques souvent extrêmes, et ce pendant plusieurs jours dans le cas des courses longue distance.

 

Pendant La Grande Odyssée Savoie Mont Blanc, par exemple, il leur faut jusqu’à 3.500 calories par jour, qui sont consommées en quatre à cinq repas. Les principaux repas consistent en une soupe de croquettes pour chien enrichies en matières grasses et en vitamines, élaborées spécialement pour eux. La soupe quant à elle permet de les hydrater correctement, en plus de l’eau qu’ils reçoivent.

 

Durant l’épreuve, on leur donne environ toutes les deux heures des snacks composés de viande congelée accompagnée d'un peu de miel, ainsi que de l’eau.

 

Un Husky Sibérien mange de la viande osseuse

Les chiens qui participent à l’Iditarod doivent absorber encore plus de calories (environ 10.000/jour, soit environ 10 fois ce qu’un chien de ce gabarit consomme normalement), car les conditions sont encore plus difficiles. On estime ainsi à 907 kg le poids total de provisions qui sont consommées par une équipe pendant toute la durée de la course, la plus grande partie étant bien sûr destinée aux chiens.

 

Leur nourriture se compose essentiellement de viande et de croquettes, auxquelles on ajoute des huiles et des suppléments vitaminiques. Ils mangent et s’hydratent aux points de contrôle, mais leur musher leur donne aussi régulièrement des collations et de l’eau entre les points de contrôle.

 

Quoi qu’il en soit, au même titre que tout ce qui a trait à leur entretien tout au long de l’épreuve, l’alimentation des chiens de traîneau pendant une compétition relève de l’entière responsabilité du musher et de son équipe.

La santé et le bien-être des chiens de traîneau

Carnet de santé d'un chien de traîneau

Comme pour tous les athlètes de haut niveau, la santé des chiens de traîneau est aussi extrêmement surveillée. Les règlements de toutes les courses font grand cas des chiens, et tout abus ou manquement de la part d'un musher est sévèrement sanctionné par une disqualification, voire des poursuites pour les cas les plus graves.

 

En premier lieu, pour s’inscrire à une course, il doit fournir la preuve que ses champions ont bien été vaccinés et sont suivis régulièrement. En outre, ils doivent être pucés, afin de pouvoir les suivre facilement entre deux points de contrôle.

 

D’ailleurs, tout au long de la compétition, le musher doit avoir avec lui en permanence le « vetbook » de chacun de ses chiens, dans lequel les vétérinaires reportent tous les problèmes de santé que l’animal a pu avoir pendant l’épreuve. S’il y en a trop, ils peuvent décider d’évacuer le chien concerné. 

 

Un chien de traîneau examiné par un vétérinaire

Plusieurs équipes de vétérinaires spécialistes des chiens de traîneau sont présentes en permanence sur les courses. Sur les plus grandes, qui sont aussi les plus longues et les plus difficiles, elles disposent d’un véritable hôpital de campagne, avec la possibilité de réaliser sur place des radios et des échographies. Composées de titulaires et d’étudiants, ces équipes regroupent plusieurs spécialités : des ostéopathes pour chien, des orthopédistes, des kinés et des urgentistes.

 

Les chiens de traîneau sont donc contrôlés très régulièrement pendant les compétitions.

 

Un Husky Sibérien subit un examen des dents

Pour prendre l’exemple de La Grande Odyssée, tous les chiens subissent un bilan clinique (pouls, tension, respiration, etc.) et orthopédique complet a veille du départ. Cet examen est ensuite répété quotidiennement pendant toute la durée de la course, aux points de contrôle, et même parfois en dehors de ceux-ci. Les vétérinaires ont ainsi toute latitude pour arrêter brièvement un équipage n’importe où et n’importe quand pendant une étape, afin de s’assurer que les chiens ne présentent aucune blessure ou signe de fatigue extrême, décelée en mesurant leur temps de récupération.

 

En cas de blessure ou de fatigue importante d'un chien en cours d’étape, le musher doit le laisser au point de contrôle ou de dépose le plus proche. S’il n’y en a pas à proximité, il doit le retirer de l’attelage et le transporter dans le traîneau.

 

Un chien de traîneau en convalescence

Les « bobos » sont quant à eux traités à l’étape. Dès leur arrivée, les chiens sont pris en charge par les vétérinaires et leur musher. C’est ce dernier qui a en charge les soins quotidiens : masser leurs muscles, leur enduire les pattes de graisse pour les protéger, etc. 

De leur côté, les vétérinaires auscultent les chiens et leur font passer un examen orthopédique. Ils prennent en charge ceux qui à l’évidence ont un problème (par exemple un chien qui boîte ou ne récupère pas assez vite), et ceux pour lesquels ils ont un doute. En cas de problème sérieux, ils peuvent décider qu’un chien ne continue pas la course.

 

Des chiens de traîneau portant un manteau de protection

Les blessures les plus fréquentes sont celles que l’on retrouve chez les athlètes humains : entorses, tendinites et coupures. En outre, si les coussinets des chiens nordiques résistent bien à la neige, il n’en va pas de même pour la glace. Or, quand le soleil brille, il fait fondre la couche superficielle de neige, puis le froid la transforme en glace, qui abîme les pattes des chiens et peut causer par exemple des abrasions ou des gelures. C’est pour cela qu’on graisse leurs coussinets et que nombre de chiens de traîneau portent des bottines pour chien. Un équipage peut d’ailleurs en utiliser jusqu’à 2000 pendant une course, car même si elles sont solides, elles s’abîment plus vite sur de longues distances et/ou sur un sol particulièrement abrasif. En outre, on les change aussi quand elles sont trop mouillées, pour éviter que le froid blesse les pattes ou les engourdisse.

 

En dehors de ces blessures, les problèmes que l’on rencontre le plus souvent dans ce type de courses sont bien sûr la déshydratation, mais aussi une propension à la diarrhée, comme chez les marathoniens. Ces désordres gastriques, qui peuvent être dus au stress du sportif, sont prévenus par l’administration de pansements gastriques et d’extraits de melon.

 

Hormis tout ce qui a trait aux soins, les vétérinaires pratiquent également des contrôles anti-dopage sur les chiens. Ils vérifient au moyen d’analyses de sang et d’urine qu’aucune substance interdite ne leur a été administrée.

Sommaire de l'article

  1. Page 1 : L’histoire des courses de chiens de traîneau
  2. 1. Les courses de chiens de traîneau au début du 20ème siècle (1907-1920)
  3. 2. Les courses de chiens de traîneau dans les années 1920
  4. 3. Les courses de chiens de traîneau dans les années 1930
  5. 4. Les courses de chiens de traîneau dans les années 60
  6. 5. Les courses de chiens de traîneau dans les années 70
  7. 6. Les courses de chiens de traîneau dans les années 80
  8. 7. Les courses de chiens de traîneau dans les années 90
  9. 8. Les courses de chiens de traîneau dans les années 2000 et 2010
  10. Page 2 : Les attelages de chiens de traîneau
  11. Page 3 : Les chiens de traîneau : sélection, formation & entraînement...
  12. 1. Les races de chiens les plus utilisées comme chiens de traîneau
  13. 2. La sélection des chiens de traîneau
  14. 3. La formation initiale des chiens de traîneau
  15. 4. L’entraînement des chiens de traîneau
  16. Page 4 : Le musher dans un attelage de chiens de traîneau
  17. 1. Qu'est-ce qu'un musher ?
  18. 2. Devenir musher
  19. 3. Les débuts en compétition d’un musher
  20. 4. La double vie des mushers de compétition
  21. 5. Les différents types de courses de chiens de traîneau
  22. 6. Débuter dans la compétition
  23. 7. Les responsabilités du musher en compétition
  24. 8. L’équipement obligatoire du musher pendant la course
  25. 9. Les contrôles auxquels le musher est soumis