Peut-on couper les oreilles d'un chien ? Pourquoi et à quel âge ?

Deux Beaucerons en haut d'une colline

Le chien est probablement l'espèce animale avec la plus grande diversité d'apparence. C'est flagrant notamment en termes de gabarit ainsi que de longueur et couleur du pelage, mais ses oreilles aussi peuvent avoir des formes et longueurs assez variées. Ainsi, certaines sont droites, d'autres tombantes, d'autres encore semi-tombantes ou repliées sur elles-mêmes, etc.


Il peut arriver que l'on souhaite modifier les oreilles d'un chien - et en particulier les couper - afin de leur donner une forme différente de celle qu'elles auraient dû avoir naturellement. Est-ce la seule raison qui peut amener à vouloir le faire ? Cette pratique est-elle légale ? Si oui, dans quels cas et jusqu'à quel âge ? Quels sont ses risques et inconvénients ?

Qu'est-ce que l'otectomie ?

Un Beauceron aux oreilles coupées et un Rottweiler assis dans un parc

L'otectomie est une opération qui vise à tailler une partie plus ou moins importante du pavillon externe (c'est-à-dire la partie externe) de l'oreille d'un animal. Le terme vient des mots grecs « otos » et « ectomie », qui signifient respectivement « oreille » et « excision ». On parle aussi parfois d'essorillement, d'otomie ou de chondromie, même si ces mots sont nettement moins usités.

 

C'est sur des chiens qu'elle est le plus pratiquée. Ceux qui ont des oreilles semi-tombantes sont les plus concernés, et le but est alors de favoriser leur redressement sur le crâne. Toutefois, on peut aussi y avoir recours pour des raisons médicales, indépendamment de leur apparence.

 

L'otectomie est une pratique très ancienne, puisqu'au début de notre ère les Romains y avaient déjà recours dans le but de prévenir les blessures au niveau des oreilles des chiens utilisés pour la chasse et les combats. C'est en tout cas ce qu'il ressort d'une étude intitulée « Tail Docking and Ear Cropping Dogs: Public Awareness and Perceptions » et publiée en 2016 dans la revue scientifique PLOS One.

 

Toutefois, elle est désormais interdite dans un nombre croissant de pays, en raison notamment de la douleur qu'elle occasionne à l'animal et du handicap qu'elle représente pour lui.

Pourquoi couper les oreilles d'un chien ?

Deux Boxers, un avec les oreilles normales et l'autre avec les oreilles coupées

Tous les représentants de la gent canine ont des oreilles, mais elles n'ont pas la même forme d'un individu à l'autre. Ainsi, elles peuvent être dressées sur la tête, semi-dressées, tombantes, repliées en arrière...

 

De manière générale, les oreilles constituent une zone vulnérable de l'anatomie du chien, en particulier lorsqu'elles ne sont pas droites. En effet, elles peuvent par exemple être écorchées par une branche ou une broussaille, ou mordues par un autre animal. Or, une telle blessure est douloureuse et met beaucoup de temps à guérir. Ceci explique que pendant des siècles, il était d'usage pour les chiens de chasse, de garde ou de combat dotés d'oreilles semi-tombantes, d'inciser ces dernières plus ou moins notablement sur les côtés afin de les forcer à se redresser pour réduire le risque de blessure. Cette opération avait aussi l'avantage de faire paraître l'animal plus grand, et donc plus menaçant.

 

Les choses depuis ont changé : l'otectomie n'est plus tellement réalisée dans ce but. De nos jours, elle est pratiquée essentiellement pour des raisons esthétiques, afin de conserver l'apparence historique des races en question.

 

Enfin, dans de rares cas de figure, un vétérinaire peut préconiser de partiellement couper une oreille (ou même les deux) pour des raisons médicales. Cela se produit notamment en présence d'otites à répétition, d'une blessure qui ne guérit pas, d'une malformation douloureuse, d'une lésion importante causée par un épillet, d'une tumeur, etc.

Quelles races de chiens ont souvent les oreilles coupées ?

Un Dobermann allongé sur le sable

Même si elle existe depuis longtemps, l'otectomie pratiquée pour des raisons utilitaires ou esthétiques ne concerne que quelques dizaines de races. Il s'agit plus précisément de certains chiens de chasse, de garde ou de combat naturellement dotés d'oreilles semi-tombantes : l'incision à un jeune âge permet alors de les faire se redresser totalement sur le crâne.

 

Parmi les races les plus connues concernées par la coupe des oreilles figurent ainsi notamment le Beauceron, le Boston Terrier, le Bouvier des Flandres, le Boxer, le Cane Corso, le Dobermann, le Dogue Argentin et le Pitbull.

Pourquoi l'otectomie est-elle problématique pour un chien ?

Un chien Boxer avec les oreilles coupées est tenu en laisse

Pratiquée pendant des siècles sans que grand monde n'y trouve quoi que ce soit à redire, l'otectomie est désormais vivement contestée. Il faut dire qu'elle n'est pas sans inconvénients pour le chien concerné :

 

  • elle engendre une douleur vive et prolongée. En effet, même si elle est normalement pratiquée sous anesthésie locale ou générale, les incisions au niveau des oreilles restent douloureuses pendant toute la durée de la cicatrisation, qui peut prendre plusieurs semaines - voire davantage ;

  • il existe un risque non négligeable de complication. Celui-ci est lié non seulement à l'anesthésie, mais aussi bien entendu à la coupe elle-même : il peut par exemple se produire une hémorragie ou une infection ;

 

  • elle altère l'audition. En effet, les chiens ont normalement la capacité de faire pivoter leurs oreilles dans tous les sens pour mieux localiser l'origine des sons qu'ils perçoivent. Or, une fois qu'elles sont coupées, elles ne peuvent plus vraiment bouger : l'animal entend donc un peu moins bien qu'avant ;

  • elle nuit à ses interactions du quotidien. En effet, les oreilles lui servent aussi à communiquer : elles trahissent de la peur lorsqu'elles sont rabattues en arrière, de la curiosité lorsqu'elles sont tournés vers l'avant, un bien-être lorsqu'elles sont relâchées... Ainsi, le fait de les couper pour qu'elles restent en permanence dressées sur la tête le prive d'un outil de communication avec ses congénères, avec les représentants des autres espèces et même avec les humains.

 

Ces différentes raisons expliquent pourquoi un nombre croissant de pays font le choix d'interdire l'otectomie, en tout cas à des fins esthétiques ou utilitaires.

Compte tenu des inconvénients et des risques que la coupe des oreilles d'un chien présente, de nombreux pays et territoires ont légiféré afin d'encadrer fortement - voire d'interdire totalement - cette pratique, en prévoyant néanmoins une exception pour des raisons médicales.

 

C'est le cas notamment de la France, la Belgique, la Suisse et le Québec.

En France

Un Saint-Hubert avec des lunettes et une balance de justice

En France, la coupe des oreilles d'un chien est une pratique interdite depuis mai 2004, en vertu du Décret n° 2004-416 du 11 mai 2004 portant publication de la convention européenne pour la protection des animaux de compagnie, faite à Strasbourg le 13 novembre 1987 et signée par la France le 18 décembre 1996. Elle n'est en fait tolérée que dans le cas où elle est préconisée par un vétérinaire pour des raisons curatives.

 

Ce décret fait suite à la ratification de la Convention européenne pour la protection des animaux de compagnie par la France en 1996, et dont l'article 10 vise à interdire diverses opérations de convenance pour les chiens.

 

Par ailleurs, le Décret n° 2008-871 du 28 août 2008 relatif à la protection des animaux de compagnie et modifiant le code rural interdit de vendre des chiens ayant subi une telle opération pour des raisons esthétiques ou utilitaires, sous peine d'une sanction pénale.

En Belgique

Un Jack Russell déguisé en juge

Comme en France, la coupe des oreilles des chiens est interdite en Belgique, en tout cas dans le cas général (c'est-à-dire motivée par des considérations esthétiques ou utilitaires). C'est ce qu'indique l'article 17 bis de la loi bien-être animal, en vigueur depuis le 1er octobre 2001.

 

Il n'y a que dans le cas où elle est expressément préconisée par un vétérinaire pour des raisons médicales et curatives qu'elle est tolérée par la loi.

En Suisse

Un Saint-Hubert avec des lunettes et un marteau de juge sur un fond gris

En Suisse non plus, il n'est pas autorisé de couper les oreilles d'un chien. C'est ce qu'indique l'Ordonnance sur la protection des animaux (OPAn) en date du 23 avril 2008.

 

Cette législation va encore plus loin que cela : il est également interdit de faire venir en Suisse un chien ayant les oreilles coupées, sauf dans le cas d'un séjour de courte durée (notamment pour des vacances) ou d'un emménagement dans le pays. Cette disposition vise à empêcher les maîtres de contourner l'interdiction en faisant opérer leur animal à l'étranger, ou en se tournant intentionnellement vers un pays où cette pratique est autorisée pour y adopter un animal ayant déjà subi une otectomie.

 

Enfin, tout résident en Suisse et possédant un chien aux oreilles coupées pour des raisons légitimes doit en informer le service cantonal concerné.

Au Québec

Comme en France, en Belgique et en Suisse, il est interdit au Québec de couper les oreilles d'un chien pour des raisons esthétiques ou utilitaires.

 

Cette interdiction est toutefois plus récente, puisqu'elle est formulée dans le Règlement sur le bien-être et la sécurité des animaux domestiques de compagnie et des équidés, paru en 2022 et entré en vigueur en 2024.

 

Comme ailleurs, une exception est toutefois prévue : cette opération est autorisée est si elle se justifie sur le plan médical.

Comment couper les oreilles d'un chien ?

Un vétérinaire en train d'opérer un chien

Même si elle est interdite dans un nombre croissant de pays et territoires, la coupe des oreilles d'un chien dans le but simplement de favoriser leur redressement sur la tête continue d'être autorisée dans d'autres.

 

L'opération consiste à retirer entre un tiers et deux tiers de la partie tombante de chaque oreille à l'aide de ciseaux chirurgicaux ou d'un scalpel, puis à refermer les plaies avec des points de suture ou éventuellement de la colle cutanée (une substance très visqueuse qui permet de maintenir la peau bien en place).

 

Il est possible ensuite de fixer les oreilles à une surface rigide ou avec du ruban adhésif le temps de la cicatrisation, pour qu'elles restent bien droites et conservent cette forme après la guérison.

 

L'otectomie est généralement réalisée par un vétérinaire, ou en tout cas sous son contrôle. Elle se pratique normalement sous anesthésie locale ou générale, afin de limiter la douleur ressentie par l'animal lors de l'incision. En revanche, cela ne permet pas de réduire celle qu'il éprouvera au cours des jours et des semaines qui suivent.

À quel âge peut-on couper les oreilles d'un chien ?

Un chiot Boxer est allongé dans l'herbe

En théorie, il est possible de couper les oreilles d'un chien à n'importe quel âge.

 

Dans la pratique, si le but est qu'elles se redressent sur le crâne, il est conseillé de le faire lorsqu'il est encore très jeune, plus précisément lorsqu'il a entre deux et quatre mois. En effet, avant deux mois, les oreilles ne sont pas encore bien formées, et l'utilisation d'un anesthésiant est déconseillée pour des questions de santé ; après quatre mois, le cartilage est souvent déjà bien consolidé, si bien que la coupe ne permet alors plus le bon redressement des pavillons auriculaires.

 

Par contre, si l'otectomie est motivée par des considérations médicales, il est légalement possible de la réaliser à n'importe quel âge - y compris donc à l'âge adulte.

Conclusion

L'otectomie est une pratique chirurgicale consistant à retirer toute une partie de l'oreille d'un chien, le plus souvent pour des raisons esthétiques ou utilitaires. Elle existe depuis des siècles, mais ses impacts négatifs sur la santé et plus largement sur le quotidien de l'animal font qu'elle est dorénavant interdite dans un nombre croissant de pays et territoires - sauf à être motivée par une raison médicale.

 

Il ne s'agit pas de la seule opération dans ce cas : il en va de même par exemple de la coupe de la queue d'un chien (caudectomie) ou de l'ablation de ses cordes vocales (dévocalisation). Elles aussi sont pratiquées depuis des lustres mais contestées un peu partout dans le monde, au point d'être de plus en plus souvent bannies.

Mise en garde

Les propos et conseils formulés ici ne remplacent pas l'expertise d'un professionnel, d'autant que chaque chien est unique. En cas de besoin ou de doute, il convient donc de se tourner vers un vétérinaire.
Dernière modification : 10/02/2024.

Les opérations de convenance