L'histoire du Border Collie

La genèse du Border Collie

Connu originellement sous le nom de Scotch Sheep Dog, le Border Collie est un chien de taille moyenne utilisé traditionnellement pour garder les troupeaux de moutons. On sait qu’il fut créé au 19ème siècle dans la région des Borders, à la frontière entre l’Écosse et l’Angleterre, mais ses origines exactes demeurent incertaines.

 

Il est probable toutefois qu’il descende des Landrace Collies, nom générique donné aux races de chiens de berger locales qui existaient alors dans cette région vallonnée (« colley » ou « collie » viendrait d’un mot celte signifiant « utile »). Ces races vivaient chacune dans une zone géographique distincte et avaient été façonnées à la fois par les bergers et par la sélection naturelle. Elles présentaient une certaine cohérence génétique, mais un type physique variable selon le terrain sur lequel elles évoluaient. Cependant, en l’absence de traces écrites (comme c’est souvent le cas), on ne sait pas laquelle précisément fut à l’origine du Border Collie. 

 

Ces Landrace Collies étaient vraisemblablement issus eux-mêmes de croisements multiples entre les grands chiens de berger qui avaient été amenés par les Romains, les petits bergers de type spitz qui accompagnèrent ensuite les conquérants vikings à la fin du 8ème siècle, et les races locales de chiens de berger (Bobtail, Bearded Collie…) et de chiens de chasse (principalement le Pointer Anglais et Setter Gordon). Au fil du temps, on obtint ainsi des chiens de travail agiles et très intelligents.

 

Au début du 19ème siècle, il existait donc plusieurs races de chiens de berger dans la région des Borders, mais toutes avaient notamment un point commun : elles étaient souvent bruyantes au travail, se servant beaucoup de leur voix pour faire obéir les moutons.

 

En sélectionnant inlassablement les meilleurs individus (ceux qui entouraient et rassemblaient le mieux le troupeau, ainsi que les plus efficaces pour aller chercher les bêtes isolées), les éleveurs de moutons et les bergers finirent ainsi par créer dans la première moitié du 19ème siècle un excellent chien de travail, qu’ils baptisèrent Scotch Sheep Dog. 

 

Ils continuèrent par la suite à développer cette nouvelle race autour de ses qualités de travail pour obtenir un chien plus intelligent, plus endurant, plus obéissant et plus silencieux.  

 

Les résultats furent tels que le Scotch Sheep Dog parvint à se distinguer clairement des autres races et apparut vite comme un chien exceptionnel, au point que dès 1858 des spécimens furent exportés vers la Nouvelle-Zélande.

La diffusion du Border Collie dans son pays d'origine

Créé et élevé dans une zone vallonnée et isolée à partir de races bergères locales, le Scotch Sheep Dog (puisque tel était le nom du Border Collie à l’époque) resta confidentiel jusqu'en 1860, année où il fut présenté à une exposition canine ayant lieu à Birmingham (Angleterre). Ce fut la première fois que les spectateurs d'un tels évènement purent y voir un chien non utilisé pour la chasse. En effet, les expositions étaient très en vogue à l’époque, mais ne s’intéressaient qu’aux chiens de chasse.

 

Selon certains, ce fut à cette occasion que la reine Victoria (1819-1901) découvrit ce chien. D'autres affirment que ce fut un peu plus tard qu’elle en vit un pour la première fois, lors d’un voyage à Balmoral. Quoi qu’il en soit, la souveraine se passionna pour lui : cela contribua grandement à le faire connaître et considérer comme une race à part entière, même si le type n’était pas encore fixé et qu’au final la reconnaissance officielle par le Kennel Club britannique ne survint qu’un siècle plus tard.

 

Les sélections se poursuivirent en vue de continuer à développer les capacités de travail du Scotch Sheep Dog. En 1873, il acquit définitivement ses titres de noblesse comme chien de travail exceptionnel grâce à la performance d’un mâle nommé Hemp, qui se distingua lors du premier concours de travail organisé à Bala, au pays de Galles. Non seulement il aboyait beaucoup moins que les autres chiens de berger, mais il lui suffisait de regarder le troupeau pour que celui-ci obtempère. En outre, il ne courait pas sans cesse autour des moutons mais rampait vers eux, un peu comme le font les félins quand ils chassent. Un autre sujet d’étonnement et d’admiration fut qu’il réagissait à un simple signe de la main ou à un sifflement du berger, semblant comprendre d’emblée ce qu’on attendait de lui.

 

Ce regard si particulier et presque hypnotique (qu’on appelle « l’œil » du Collie) ainsi que cette façon de se déplacer rapidement au ras du sol perdurent de nos jours, et font partie des spécificités du Border Collie. Il faut dire qu’« Old Hemp » eut de nombreux descendants, et est considéré comme l’ancêtre de la race moderne.

 

Sa performance remarquée contribua à rendre la race populaire parmi les éleveurs et les bergers, et cette popularité s’accrut encore après 1876. Cette année-là, Richard John Lloyd Price (1843-1923), journaliste et écrivain mais aussi juge dans des expositions canines et organisateur des premiers concours de travail au Royaume-Uni, amena à Londres 100 moutons sauvages du pays de Galles pour faire une démonstration des talents de ce chien. L’événement fut commenté par le Livestock Journal, qui décrivit l’étonnement admiratif des spectateurs devant son efficacité.

 

Il fallut toutefois attendre 1906 pour qu’un premier standard de la race soit publié. Celui-ci avait la particularité de n’être basé que sur les capacités de travail, et ne tenait aucun compte de l’apparence. La même année fut créée l’International Sheep Dog Society (ISDS), association chargée aujourd’hui encore de la promotion et de l’amélioration de cette dernière, mais en continuant de ne considérer que ses qualités de travail.

 

Le Scotch Sheep Dog prit officiellement le nom de Border Collie en 1915, mais cela ne changea rien au fait que ce chien continua à n’être élevé qu’en fonction de ses aptitudes au travail. Par conséquent, pendant la majeure partie du 20ème siècle, il continua de présenter une apparence très variable.

 

On ne commença à attacher de l’importance à ce critère qu’à partir du moment où le Kennel Club britannique reconnut la race, en 1976. À partir de là, on vit l’apparition au Royaume-Uni de deux types de lignées distinctes (d’exposition d’une part, de travail de l’autre), dont les représentants étaient inscrits dans des registres différents. En effet, les spécimens destinés au travail étaient enregistrés auprès de l’ISDS, qui continuait à ne tenir aucun compte de l’apparence, tandis que les autres (d’exposition, de sport canin et de compagnie) l’étaient auprès du Kennel Club et devaient respecter une apparence standardisée. Les individus inscrits auprès de l’ISDS qui correspondaient aux exigences du Kennel Club pouvaient obtenir d’office un enregistrement auprès de ce dernier, mais ceux qui n’étaient pas utilisés pour le travail devaient prouver leur aptitude sur troupeau pour intégrer l’ISDS.

 

Ce procédé de double enregistrement est d’ailleurs toujours en vigueur en Grande-Bretagne et a été repris dans d’autres pays – notamment en France.

La diffusion internationale du Border Collie

On sait que des Scotch Sheep Dogs, l’ancien nom du Border Collie, furent exportés en Nouvelle-Zélande dès 1858.

 

En revanche, sa diffusion en Amérique du Nord et en Europe est nettement moins documentée. Il est toutefois probable que la race se soit fait connaître auprès des éleveurs à travers les concours de travail, suscitant le même enthousiasme qu’au Royaume-Uni. En ce qui concerne les États-Unis, le United Kennel Club (UKC) reconnut la race en 1961, suivi bien plus tard par l’American Kennel Club (AKC), en 1995. Le Club Canin Canadien (CCC) voisin en fit de même.

 

Pour ce qui est de l’Europe, on sait que les premiers spécimens furent introduits en France au début des années 70. On manque néanmoins d’informations sur sa diffusion dans d’autres pays, notamment la Belgique et la Suisse, mais la reconnaissance du Border Collie par la Fédération Cynologique Internationale (FCI) en 1977 eut un impact important sur celle-ci, puisque qu’elle entraîna celle de la centaine d’organismes cynologiques nationaux qui sont membres de la FCI. C’est le cas notamment de ceux de la France (la Société Centrale Canine, ou SCC), de la Belgique (la Société Royale Saint-Hubert, ou SRSH), de la Suisse (la Société Cynologique Suisse, ou SCS) et de nombreux autres pays européens.

 

Que ce soit dans son pays d’origine ou ailleurs, la reconnaissance du Border Collie fut donc assez tardive. Cela ne l’empêcha pas de se diffuser ensuite très largement, au point d’être aujourd’hui la race de chien de berger la plus utilisée dans le monde.