Les chiens d'une même race ont des traits de caractère communs, mais chaque individu est unique et a sa propre personnalité.
Ainsi, même si les principes généraux de l'éducation et de la conduite du chien répondent aux mêmes règles, leur mise en pratique varie beaucoup selon le caractère du chien - c'est-à-dire l'ensemble de ses réactions devant un stimulus -, mais aussi selon son vécu, sa provenance et son sexe.
Chaque chien a son propre caractère, mais on peut regrouper ceux-ci en tempéraments canins, d'autant plus que beaucoup de races ont été sélectionnées pour une fonction précise, et que leur comportement s'en est trouvé modifié.
Par ailleurs, une cohabitation très longue et de plus en plus étroite entre l'être humain et le chien a peu a peu modifié les comportements initiaux de l'animal, par une sélection des gènes comportementaux. Ce mécanisme est très bien décrit par la sociobiologie.
Ainsi, on peut estimer que le chien et le loup ne sont qu'une seule et même espèce qui s'est clivée en deux groupes, en fonction de l'attirance ou la peur vis-à-vis du feu. À partir de là, se sont différenciées des formes multiples dans les deux clades, pour aboutir aux races actuelles. Il serait étonnant que l'étroitesse de la relation humain-chien n'ait pas profondément modifié les caractéristiques comportementales des races, dont les bases génétiques commencent à être mieux connues.
Enfin, on admet aujourd'hui le rôle des phéromones, c'est-à-dire de messages chimiques relationnels, chez l'être humain. Cela affine mieux la compréhension des relations croisées entre un humain et un chien. Comparer les différences de comportement du chien et du loup, c'est faire fi de tout ce que la domestication a engendré comme changements chez le meilleur ami de l'Homme, et donc se limiter à une fraction de son comportement.
Il n'empêche que bien des éléments restent communs, surtout chez les chiens qui appartiennent à des races primitives, peu marquées par l'humanisation. L'instinct grégaire de meute y est très puissant, d'où les hurlements et la tendance à fuguer du Husky Sibérien, le côté plutôt apprivoisé de l'Azawakh, ou encore la chasse spontanée en meute des Pondencos et Basenjis.
Le métis issu de deux races bergères ou de défense retrouvera souvent un comportement farouche si les mécanismes d'inhibition de l'agression qui ont été sélectionnés pour permettre l'élevage des races parentales reposent sur des voies distinctes abolies par le croisement.
L'ensemble des bases génétiques du chien paraît établi vers l'âge de 7 semaines, à plus ou moins 1 semaine près. Elles vont s'ajouter aux effets de l'éducation et au rôle maternel pour forger le tempérament définitif du chien. On insiste beaucoup, et à juste titre, sur le rôle de la socialisation du chiot dans son développement comportemental, mais même dans des conditions d'élevage défectueuses, il y a une amorce de socialisation primaire qui permettra, dans les pires des cas, de rétablir une forme de socialisation secondaire, parfois avec attachement exclusif à une personne : le maître accepté par le chien.
Cependant, l'expérience précoce, c'est-à-dire l'acquisition de mécanismes adaptatifs à l'environnement inanimé ou humain du chien, est peut-être plus importante. Nicole Ver a démontré que cette acquisition commençait, chez le chaton, dès sa première semaine de vie. Chez les chiens, elle débuterait à deux semaines.
La stabilité émotionnelle commence à se forger au cours du développement prénatal du chiot, dès la fin du premier mois de la gestation de la chienne. Il est donc logique que les expériences vécues dans la première semaine de vie aient une influence, même si l'essentiel se joue entre la quatrième et la septième semaine, période dite de formation. Cette stabilité émotionnelle débute donc lors de la phase d'éveil, voire en période néonatale, et se termine vers deux mois. Elle est liée au comportement exploratoire : le chiot apprend à dialoguer avec l'objet, alors que la socialisation, qui couvre la même période, lui enseigne à dialoguer avec les autres êtres vivants.
Grâce à ces stimuli répétés, les connexions neuronales s'établissent dans le cerveau du chiot. Elles vont permettre l'apprentissage, mais aussi la sérénité, car le registre comportemental comprend les réactions usuelles aux nouveautés. Le jeu a donc un rôle majeur dans la formation du caractère du chien ; c'est pourquoi il doit découvrir un environnement riche, s'habituer à l'herbe, aux bruits de la maison, à ceux de la ville... De fait, si le chiot a une bonne expérience précoce, il s'habituera à tous les bruits, même nouveaux.
Dans l'idéal, un chiot devrait pouvoir partager avec ses congénères entre 150m² et 3 hectares de terrain. En deçà, il risque d'avoir un comportement exploratoire limité et au-delà, la zone sera trop vaste : le réseau indicateur de la zone de circulation, des marques de la meute, sera trop flou pour le rassurer, et il pourra se sentir abandonné.
Peu à peu, le chiot va s'enhardir et prendre de la confiance, ce qui lui permettra par la suite d'affronter les problèmes qu'il rencontrera. Sans expérience précoce, il deviendra timide, inquiet et sujet à des paniques incontrôlées. Il aura donc besoin d'être constamment rassuré. Ainsi, untel urinera sur le lit, un autre reviendra du jardin auprès de son maître pour se rassurer et urinera d'émotion. La miction est en effet un réflexe, qui peut être involontaire ou qui vise à marquer son territoire. Le punir ou le gronder n'est pas la bonne solution, car cela renforcera le phénomène. Il faut au contraire le calmer, le rassurer voire même le féliciter, tout en prenant garde à ne pas le conditionner.
Ainsi, le manque d'expérience précoce est, pour l'éleveur de chiens, une cause plus grave et beaucoup plus fréquente que le manque de socialisation, avec lequel il est souvent confondu. Les chiots élevés en chenil ou en batterie sont bien sûr atteints, alors que les soins quotidiens donneront une amorce de socialisation.
Paradoxalement, ce manque d'expérience précoce frappe également les chiots des éleveurs non professionnels lorsqu'ils naissent en automne ou en hiver. En effet, l'éleveur a alors tendance à surprotéger ses chiots et ne pas les sortir par crainte du froid ou de la pluie. Les petits seront hypersocialisés, mais sans expérience précoce, et donc timides. Ils resteront sujets aux paniques soudaines qui vont les précipiter à travers les rues. Ils auront toujours un temps de latence avant de répondre à un ordre ou de trouver une solution face à une situation nouvelle. Mais dès que cette étape sera franchie, ils seront aussi vifs que d'autres. De plus, les chiens sans expérience précoce sont inaptes au travail, car éliminés avant d'avoir fait leurs preuves.
L'expérience précoce des chiots est donc, avec le jeu, un facteur essentiel à l'établissement d'un bon tempérament, mais elle doit s'accompagner d'une bonne socialisation des chiots envers d'autres êtres vivants, humains ou animaux.
On distingue chez les chiens quatre personnalités différentes :
Bien des comportements gênants proviennent de malentendus dans la communication humain-chien, notamment si le registre propre à certains types de races n'est pas tout à fait le même que celui des plus connus. Il y a ainsi des particularités nettes chez les lévriers, les chiens de montagne et les chiens asiatiques.
Si l'on baptise langage l'ensemble des signaux de communication du chien, il n'est pas étonnant que cette espèce ait aussi ses dialectes, ce qui pourrait expliquer l'observation fréquente de chiens à morphotype commun s'agréger pour repousser les autres.
Spécialiste de l'analyse du caractère des chiens
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