Suisse - Au pied des pyramides, chiens et pique-niqueurs se contemplent

22/05/2009

COHABITATION | Au seul endroit du bord du lac où les chiens peuvent s’ébattre, leurs maîtres et les pique-niqueurs apprennent la tolérance.

Alain Walther

Un labrador sort du lac et s’ébroue. Ses maîtres, en ce matin de l’Ascension, sont venus de la campagne vaudoise pour qu’il puisse nager. Le chien marche sur le chemin de terre. Qu’il mette un pied sur le chemin bitumé le long du camping et ses propriétaires seront en infraction. Telles sont les arcanes du règlement qui gère la présence des chiens l’été au bord du Léman. Forcément incompréhensibles pour un chien et compliquées à appliquer pour un être humain. Vétérinaire et directrice d’une école de chiots, Anne-Marie Villars estime d’ailleurs qu’il est difficile de dresser les maîtres tant le règlement lausannois est complexe. Mais aux pyramides de Vidy, toujours selon le même règlement, les chiens peuvent se promener en liberté toute l’année.

Liberté canine ignorée
Avec ses deux chiennes, Nicole* passe tous les jours aux pyramides et par n’importe quel temps. «Je prône la tolérance entre propriétaires de chiens et pique-niqueurs, mais ces derniers ne savent pas toujours qu’ils sont sur une zone libre pour les chiens. Ils se croient totalement chez eux.» L’amie des bêtes connaît même des «contribuables qui voudraient que l’endroit soit clôturé et réservé aux chiens».

Au Service des parcs et promenades, on a enregistré aucune plainte d’un côté ou de l’autre. «On espère que tout le monde arrive à cohabiter. Aux pyramides de Vidy, explique Marc-Henri Pavillard, les chiens sont certes libres mais pas prioritaires.» Nicole a fait partie d’une commission consultative quand la ville a redécoupé les zones pour chiens en 2003. «Il a fallu renoncer à la promenade dans les ruines romaines de Vidy.»

Selon elle, les chiens n’ont pas bonne presse. Nicole a ainsi consolé «une petite vieille en larmes». La dame s’était fait traiter de tous les noms d’oiseaux par une famille parce que son yorkshire était en liberté là où même un molosse a le droit de batifoler. Mais hier, la paix régnait au pied des pyramides.

Bonnes odeurs
Une famille tamoule a installé son grill au sommet, une autre vietnamienne a pris ses quartiers près du boulodrome. Quant au roquet des pétanqueurs, son maître l’a accroché en zone chien en laisse. Les chiens n’aboient pas, la caravane des engueulades ne passe pas.

«L’ennui, ce sont les odeurs. Comment, se demande la promeneuse cynophile, faire comprendre à un chien gourmand que ce n’est pas pour lui?» Résister à l’appel des brochettes, c’est déjà difficile pour un quidam. Alors pour un chien… Quant aux déchets, aux bouteilles cassées des noctambules et aux reliefs abandonnés après des agapes lacustres, ils gênent tout le monde.

Solution de repli
En cas de querelles trop chaudes, reste une solution de repli: selon le règlement encore, les chiens sont libres comme l’air sur la pelouse centrale du rond-point de la Maladière. Et là, pour cause de gaz d’échappement, leurs maîtres peuvent être certains qu’ils n’auront pas à cohabiter avec des pique-niqueurs.

*Prénom modifié par la rédaction

Photo : VANESSA CARDOSO | Les pique-niqueurs qui n’aiment pas les chiens ont tout intérêt à ne pas fréquenter la pelouse des pyramides de Vidy, seul espace de liberté des toutous au bord du lac.