Un loup voyant un très gros chien attaché par un collier lui demanda : « Qui t’a lié et nourri de la sorte ? — Un chasseur, » répondit le chien. « Ah ! Dieu garde de cela le loup qui m’est cher ! Autant la faim qu’un collier pesant. »
Cette fable montre que dans le malheur on n’a même pas les plaisirs du ventre.
Très bref texte du fabuliste grec Ésope (7ème-6ème siècle avant J.-C.), « Le Loup et le Chien » porte le numéro 226 dans le recueil Fables d’Ésope, paru en 1927 et qui regroupe pas moins de 358 fables traduites en français par Émile Chambry.
Comme dans beaucoup d’autres fables de l’Antiquité, le meilleur ami de l’Homme est ici confronté à son ancêtre sauvage. Mais dans cette histoire, le loup ne cherche pas à berner ou à manger le chien avec qui il échange. Intrigué à la fois par sa corpulence et par le fait qu’il soit attaché, il l’interroge sur la personne responsable de ces deux faits. Lorsque son interlocuteur lui répond que c’est un chasseur, il s’offusque : même s’il envie certainement les avantages dont bénéficie cet animal bien nourri, il préfère encore la faim que la privation de liberté.
Sa réflexion est immédiatement suivie par la morale de l’histoire (« dans le malheur on n’a même pas les plaisirs du ventre »), qu’on peut trouver assez terne compte tenu de la puissance symbolique du récit.
Au cours des siècles suivants, deux fabulistes de renom reprennent et approfondissent ce dernier : le Latin Phèdre (1er siècle avant J.-C.) et le Français Jean de La Fontaine (1621-1695), auteurs chacun d’une fable également intitulée « Le Loup et le Chien ». Les deux auteurs offrent un récit plus étoffé en développant davantage l’opposition entre la servitude du chien, toujours représentée par son collier, et la liberté du loup, qui préfère souffrir de la faim plutôt que de porter un tel objet.