Ceux qui donnent de mauvais conseils aux gens sages perdent leur temps, et font rire d'eux.
On dit que les chiens ne boivent l'eau du Nil qu'en courant, de peur d'être saisis par les Crocodiles. Un Chien donc courait, et commençait à boire, lorsqu'un Crocodile lui dit : « Bois à loisir,... et ne crains rien. — Certes je le ferais, repartit le Chien, si je ne te savais très friand de ma chair. »
« Le Chien et le Crocodile » est une courte fable de l’auteur latin Phèdre, né vers 14 avant J.-C. et mort en 50 après J.-C. Elle est en vers dans sa version originale et porte le numéro 25 dans le livre I des Fables ésopiques de Phèdre, affranchi d’Auguste, traduites en prose en français par Ernest Panckoucke.
Prenant place sur les bords du Nil, elle oppose dans ce décor exotique un chien à un animal qui apparaît nettement moins fréquemment que le meilleur ami de l’Homme dans les fables de l’Antiquité : un crocodile. Et comme dans une autre fable de Phèdre, « Le Chien fidèle », il se distingue par sa perspicacité, qui lui permet d’éviter le piège qui lui est tendu.
L’auteur commence son récit en expliquant que les représentants de la gent canine ne boivent l’eau du Nil qu’en courant, afin d’éviter le danger que représentent les crocodiles. Un jour, l’un de ces derniers tente justement de convaincre un chien de prendre le temps de s’arrêter, en se présentant comme inoffensif. C’est peine perdue : le chien est rusé, et répond qu’il ne le fera pas car il a percé ses intentions.
Comme l’explique Phèdre dans sa morale, le chien représente ici les « gens sages », à qui il est vain de donner des conseils mal intentionnés.
Cette histoire est reprise au 18ème siècle par le fabuliste espagnol Felix María Samaniego (1745-1801), qui publie en 1781 une fable également intitulée « Le Chien et le Crocodile ». Toutefois, plutôt que de se concentrer sur la sottise du second, celle-ci fait l’éloge de la sagesse du premier.