40 fables avec un chien

Illustration en noir et blanc de la fable «l'âne et le chien » de Jean de La Fontaine

Récits imaginaires mêlant créativité et sagesse, les fables existent depuis des milliers d’années et sont présentes dans de nombreuses cultures.


Dans le monde occidental et slave, leurs personnages sont bien souvent des animaux, et les chiens figurent en bonne place parmi ces derniers. Toutefois, le rôle qu’ils y jouent a naturellement évolué avec le temps.


Voici une sélection de 40 fables avec au moins un représentant de la gent canine, précédée d’une rétrospective sur la place que les fabulistes ont accordé à cette espèce au fil des âges.

Sommaire de l'article

  1. Page 1 : Le chien dans les fables
  2. Page 2 : « Les Deux Chiens », d’Ésope (7ème-6ème siècle avant J.-C.)
  3. Page 3 : « Les Chiens affamés », d’Ésope (7ème-6ème siècle avant J.-C.)
  4. Page 4 : « Le Chien endormi et le Loup », d’Ésope (7ème-6ème siècle avant J.-C.)
  5. Page 5 : « Le Chien qui porte de la viande », d’Ésope (7ème-6ème siècle avant J.-C.)
  6. Page 6 : « Les Chiens réconciliés avec les Loups », d’Ésope (7ème-6ème siècle avant J.-C.)
  7. Page 7 : « Le Loup et le Chien », d’Ésope (7ème-6ème siècle avant J.-C.)
  8. Page 8 : « La Brebis, le Chien et le Loup », de Phèdre (1er siècle après J.-C.)
  9. Page 9 : « Le Chien fidèle », de Phèdre (1er siècle après J.-C.)
  10. Page 10 : « Le Chien et le Crocodile », de Phèdre (1er siècle après J.-C.)
  11. Page 11 : « Le Loup et le Chien », de Phèdre (1er siècle après J.-C.)
  12. Page 12 : « Les Ambassadeurs des chiens et Jupiter », de Phèdre (1er siècle après J.-C.)
  13. Page 13 : « Le Chien et le Chasseur », de Phèdre (1er siècle après J.-C.)
  14. Page 14 : « Le Chien et la Brebis », de Marie de France (vers 1175)
  15. Page 15 : « Le Chien et la Puce », de Léonard de Vinci (vers 1490)
  16. Page 16 : « Le vieux Chien et son Maître », de Gilles Corrozet (1542)
  17. Page 17 : « Le Loup et le Chien », de Jean de La Fontaine (1668)
  18. Page 18 : « Le Chien qui lâche sa proie pour l’ombre », de Jean de La Fontaine (1668)
  19. Page 19 : « Le Chien et son Maître », d’Antoine Furetière (1671)
  20. Page 20 : « Les deux Chiens et l’Âne mort », de Jean de La Fontaine (1678)
  21. Page 21 : « Le Loup et le Chien maigre », de Jean de La Fontaine (1678)
  22. Page 22 : « Le Chien à qui on a coupé les oreilles », de Jean de La Fontaine (1678)
  23. Page 23 : « Le Chien trompé », de Charles Perrault (1699)
  24. Page 24 : « Le Chien de berger et le Loup », de John Gay (1727)
  25. Page 25 : « Le Chien couchant et la Perdrix », de John Gay (1727)
  26. Page 26 : « Le Roquet, le Cheval et le Chien de chasse », de John Gay (1727)
  27. Page 27 : « Les Deux Chiens », de Christian Fürchtegott Gellert (1746)
  28. Page 28 : « Le Chien et le Chasseur », d’Ignacy Krasicki (1779)
  29. Page 29 : « Le Vieux Chien et le Vieux Serviteur », d’Ignacy Krasicki (1779)
  30. Page 30 : « Le Maître et le Chien », d’Ignacy Krasicki (1779)
  31. Page 31 : « Le Chien et le Crocodile », de Félix María Samaniego (1781)
  32. Page 32 : « L’Aveugle et son Chien », de Jacques Cazotte (1788)
  33. Page 33 : « Le Chien et le Chat », de Jean-Pierre Claris de Florian (1792)
  34. Page 34 : « La Brebis et le Chien », de Jean-Pierre Claris de Florian (1792)
  35. Page 35 : « Le Petit Chien », de Jean-Pierre Claris de Florian (1792)
  36. Page 36 : « L’Éléphant et le Carlin », d’Ivan Krylov (1815)
  37. Page 37 : « Le Villageois et le Chien », d’Ivan Krylov (1843)
  38. Page 38 : « Le Chien et le Loup », de Léon Tolstoï (1875)
  39. Page 39 : « Le Loup et les deux Bassets », de Léon-Pamphile Le May (1882)
  40. Page 40 : « Le Chien pelé », de Jean Anouilh (1962)
  41. Page 41 : « Le Lévrier », de Jean Anouilh (1962)

Qu’est-ce qu’une fable ?

Portrait du Français Jean de La Fontaine, le plus célèbre fabuliste francophone
Jean de La Fontaine

Les fables sont de brefs récits en prose ou en vers dont le but est de transmettre une leçon d’ordre moral, c'est-à-dire des principes éthiques ou des éléments de sagesse ancestrale. Elles existent depuis des milliers d’années, et comme les mythes sont présentes dans d’innombrables cultures.

 

Leur transmission se faisait originellement à l’oral. Les plus anciennes fables écrites furent pour leur part découvertes en Mésopotamie et datent d’environ 2000 ans avant notre ère.

 

Les personnages que les fables mettent en scène sont majoritairement des animaux, bien qu’on puisse également y trouver des humains, des dieux, des végétaux, des forces de la nature (le vent, le pluie…) ou des objets. Quoi qu’il en soit, les protagonistes qui ne sont pas des humains sont toujours personnifiés, dans la mesure où ils s’expriment - voire agissent - comme s’ils en étaient.

 

Si les personnages de fables sont le plus souvent des animaux, c’est parce que le récit s’appuie souvent sur des stéréotypes ou des traits de personnalité qui leur sont associés : par exemple, le renard joue le rôle du malin dans la plupart des fables où il figure. Il peut aussi se fonder sur des caractéristiques physiques qui leur sont propres. Par exemple, dans le cas de « Le Lièvre et la Tortue », histoire reprise par de nombreux auteurs dont le Français Jean de La Fontaine (1621-1695), mais dont l’origine remonte au Grec Ésope (7ème et 6ème siècle avant J.-C.), le premier est aussi rapide que la seconde est lente.

 

Dans un cas comme dans l’autre, ces techniques permettent au lecteur de cerner rapidement le ou les protagoniste(s), ce qui est d’autant plus utile que les œuvres de ce type se caractérisent par leur brièveté.

 

En général, elles se construisent sur une opposition entre les personnages nommés dans le titre : les deux protagonistes, qui représentent des traits de personnalité et/ou des caractéristiques physiques opposés, se retrouvent très rapidement dans un débat ou une situation de conflit. Et bien souvent, celui qui en sort vainqueur n’est pas celui qui apparaissait au départ comme le mieux placé pour gagner.

 

Dans tous les cas, le récit a pour but d’illustrer une leçon morale ou un message éthique. Cette « morale » prend souvent la forme d’un commentaire théorique qui précède ou conclut le récit. Concise et formulée pour être facile à mémoriser, elle expose la leçon de vie qu’il faut tirer de l’histoire.

Le chien dans les fables de l’Antiquité : ses fonctions et son ambivalence

Portrait du Grec Ésope, plus grand fabuliste de l'Antiquité
Ésope

La domestication du chien par l’Homme explique sans doute que celui-ci semble être l’animal le plus représenté dans les fables, et ce dès l’Antiquité. Il est ainsi très présent dans l’œuvre du plus grand fabuliste de cette période : Ésope, auteur grec d’origine thrace qui vécut aux 7ème et 6ème siècles avant J.-C. et que beaucoup considèrent comme le premier fabuliste occidental. En effet, sur ses 358 fables, pas moins de 29 font mention dans leur titre d’un ou plusieurs représentants de la gent canine. Phèdre, auteur latin également d’origine thrace qui naquit vers 14 avant J.-C. et mourut en 50 après J.-C., est l’autre fabuliste incontournable de l’Antiquité, et accorde lui aussi une place importante au chien dans son œuvre. 

 

Toutefois, le meilleur ami de l’Homme n’a pas encore à l’époque le rôle d’animal de compagnie qu’on lui connaît aujourd’hui. Ainsi, il est caractérisé dans les fables par le travail qu’il effectue pour son propriétaire : la garde, la chasse ou la protection des troupeaux. L’histoire porte souvent sur la façon, bonne ou mauvaise, dont il exerce ce qu’on pourrait presque qualifier de « métier ». Par exemple, la fable d’Ésope « Les Chiens réconciliés avec les Loups » met en scène de mauvais chiens de berger, et porte sur la traîtrise. Au contraire, Phèdre présente dans « Le Chien fidèle » un bon chien de garde qui refuse de se laisser soudoyer. Dans « Le Chien et le Chasseur », il met en scène un chien de chasse autrefois excellent, mais qui du fait de l’âge est devenu sensiblement moins performant. Enfin, dans « Les Deux Chiens », Ésope va même jusqu’à faire s’opposer un chien de garde et un chien de chasse.

 

En tout cas, sachant que les personnages animaux des fables sont souvent construits sur des stéréotypes ou traits de personnalité qui leur sont associés, on peut se demander quels sont justement ceux attribués aux chiens dans ce type de récit durant l’Antiquité. En l’occurrence, celui qui se détache le plus est la gourmandise. On la retrouve par exemple dans deux œuvres d’Ésope : « Les Chiens affamés » et « Le Chien qui porte de la viande ». Elle symbolise la démesure dans la première, et la convoitise dans la seconde.

 

Cela dit, l’image du chien dans les fables de l’Antiquité demeure ambivalente. En particulier, il peut représenter aussi bien la sagesse que la bêtise, y compris chez un même auteur. C’est le cas chez Ésope, qui le présente comme rusé et prudent dans « Le Chien endormi et le loup », alors qu’il en fait l’incarnation de la stupidité dans « Les Chiens affamés ». De la même façon, chez Phèdre, il apparaît plein de sagesse dans « Le Chien et le Crocodile », mais d’une stupidité ridicule dans « Les Ambassadeurs des chiens et Jupiter ». En outre, il incarne parfois l’assiduité, et d’autres fois au contraire la paresse : avec « Les Deux Chiens », Ésope mêle carrément les deux dans une même fable.

 

On retrouve la même ambivalence en ce qui concerne ses relations avec les humains ou avec les autres animaux. Par exemple, alors que Phèdre s’appuie sur le stéréotype de la fidélité dans « Le Chien fidèle », il fait en revanche du chien l’incarnation de la traitrise dans « La Brebis, le Chien et le Loup » – tout comme son prédécesseur Ésope l’avait fait avant lui dans « Les Chiens réconciliés avec les Loups ».

 

Enfin, le chien est présenté comme un symbole de l’asservissement dans une fable d’Ésope qui inspirera beaucoup d’auteurs au fil des siècles : « Le Loup et le Chien ». Dans le même ordre d’idées, il incarne les victimes d’injustices dans « Le Chien et le Chasseur » de Phèdre.

Du Moyen Âge au 17ème siècle, une image assez peu changée

La poète française Marie de France, autrice de multiples fables
Marie de France

Du Moyen Âge au 17ème siècle, les fables de l’Antiquité sont reprises et adaptées au goût de leur époque par les plus grands auteurs européens, qui en parallèle inventent également leurs propres histoires. Néanmoins, la place que le chien y occupe et les concepts qu’il incarne demeurent assez similaires.

 

Il est ainsi le plus souvent présenté à travers la fonction qu’il occupe, et qu’il effectue bien ou mal. C’est ainsi par exemple que Marie de France (qui vécut aux 12ème et 13ème siècles) met en scène un chien de berger dans « Le Chien et la Brebis » (vers 1175), inspiré d’une œuvre de Phèdre ; que son compatriote Gilles Corrozet (1510-1568) fait d’un chien de chasse le héros de « Le Vieux Chien et son Maître » (1542), également inspirée par un texte de Phèdre ; tandis qu’un chien de garde est mis à l’honneur par cet autre homme de lettres français qu’est Antoine Furetière (1619-1688) dans « Le Chien et son Maître » (1671).

 

Quant à l’image du chien dans les fables de l’époque, elle demeure toujours aussi ambivalente. Le plus célèbre des fabulistes modernes, l’écrivain français Jean de La Fontaine (1621-1695), l’illustre d’ailleurs très bien dans « Les deux Chiens et l’Âne mort » (1678), puisqu’il y écrit ceci : « Parmi les animaux le Chien se pique d'être / Soigneux et fidèle à son maître / Mais il est sot, il est gourmand ».

 

D’ailleurs, dans « Le Chien qui lâche la proie pour l’ombre » (1668), le personnage principal effectue une action qui reflète parfaitement ces deux défauts. Mais d’un autre côté, dans « Le Loup et le Chien maigre » (1678), La Fontaine fait du second un symbole de la ruse et du discernement. Son contemporain Antoine Furetière le présente quant à lui comme un modèle de sagesse dans « Le Chien et son Maître » (1671).

 

Comme dans l’Antiquité, cette ambivalence porte aussi sur les relations entre le chien et les autres espèces – humains ou animaux. Ainsi, il prend les traits d’un traître chez Marie de France dans « Le Chien et la Brebis », d’un agresseur chez La Fontaine dans « Le Chien à qui on a coupé les oreilles », tandis qu’au contraire il est victime d’une injustice chez Corrozet dans « Le Vieux Chien et son Maître ».

 

Enfin, inspiré par Ésope et Phèdre pour « Le Loup et le Chien » (1668), La Fontaine se sert du chien pour incarner l’asservissement. Toutefois, en le présentant aussi comme un être prêt à se soumettre et à flatter n’importe quelle personne influente afin de conserver ses avantages matériels, il entre davantage dans la critique sociale. Cette idée fait des émules dans les siècles qui suivent.

Au 18ème siècle, le chien comme symbole d’arrogance, d’asservissement ou d’injustice

Portrait en noir et blanc du poète Jean-Pierre Claris de Florian, auteur de la fable « Le Petit Chien », (1792)
Jean-Pierre Claris de Florian

Les fables ont le vent en poupe dans l’Europe du 18ème siècle, et le chien s’y caractérise toujours généralement par le « métier » qu’il exerce (bien ou mal) : généralement la garde, la chasse ou encore la protection des troupeaux. On note cependant une originalité chez l’écrivain français Jacques Cazotte (1719-1792), qui met en scène un chien guide d’aveugle dans « L’Aveugle et son Chien » (1788).

 

L’écrivain britannique John Gay (1685-1732) fait apparaître quant à lui dans « Le Roquet, le Cheval et le Chien de chasse » ainsi que dans « Le Roquet et le Mâtin » (1727) un nouveau type de chien, qui échappe à cette règle en ne remplissant aucune fonction spécifique : le roquet, symbole de vanité et d’arrogance. On le trouve aussi notamment dans « Le Petit Chien » (1792), du Français Jean-Pierre Claris de Florian (1755-1794).

 

Par ailleurs, on constate toujours une certaine ambivalence concernant la vision du chien dans les fables. Ainsi, il incarne dans certaines la sagesse : c’est le cas par exemple dans « Le Chien et le Crocodile » (1781), une fable de l’Espagnol Félix María Samaniego (1745-1801) inspirée par une œuvre de Phèdre ; ou encore dans « La Brebis et le Chien » (1792), un texte de Florian. Mais dans d’autres en revanche, y compris parfois chez le même auteur, il est une incarnation de la sottise : il en va ainsi notamment dans « Le Chien et le Chat » (1792), également écrite par Florian.

 

Cela dit, l’idée qui revient le plus chez les fabulistes européens du 18ème siècle est celle, développée au siècle précédent par La Fontaine dans « Le Loup et le Chien » (1668), d’asservissement volontaire aux humains dans le but d’obtenir des avantages matériels. On la retrouve chez John Gay dans « Le Chien de berger et le Loup » (1727), où l’animal est présenté comme un vil représentant de l’hypocrisie de l’Homme, ainsi que dans « Le Chien couchant et la Perdrix » (1727), où il apparaît comme un courtisan prêt à toutes les bassesses pour bénéficier du confort matériel que lui offrent les humains – à l’instar de ce qui figurait dans le texte de La Fontaine. Dans « Les Deux Chiens » (1746), l’Allemand Christian Fürchtegott Gellert (1717-1769) se concentre davantage sur le fait qu’il les flatte. 

 

Le 18ème siècle étant aussi celui des Lumières, beaucoup de fabulistes de l’époque réfléchissant sur la notion de justice puisent également leur inspiration dans les fables de l’Antiquité où des chiens subissent des traitements immérités. C’est ainsi qu’un chien réprimandé pour des fautes qu’il n’a pas commises ou des choses sur lesquelles il n’a aucun pouvoir devient un symbole d’injustice sociale chez Krasicki dans « Le Vieux Chien et le Vieux Serviteur » ainsi que dans « Le Maître et son chien » (toutes deux publiées en 1779). Il en va de même chez Cazotte dans « L’Aveugle et son Chien » (1788), ou encore chez Florian dans « Le Chien et le Chat » ainsi que « La Brebis et le Chien » (toutes deux datées de 1792).

19ème et 20ème siècles : le chien comme personnage comique, politique et pédagogique

Photo noir et blanc de l'écrivain russe Léon Tolstoï vu de face
Léon Tolstoï

Le 19ème siècle marque un certain déclin dans la popularité des fables. Hormis en Russie, où le fabuliste Ivan Krylov (1769-1844) et l’écrivain Léon Tolstoï (1828-1910) parviennent par leur virtuosité à préserver l’intérêt des lecteurs pour ce genre littéraire, ce dernier devient beaucoup moins courant.

 

Les auteurs qui y ont recours tendent souvent à donner à leurs écrits une dimension pédagogique ou politique. C’est ce que fait par exemple le Canadien Léon-Pamphile Le May (1837-1918) dans « Le Loup et les deux Bassets » (1882) : il joue sur l’image ambivalente du chien dans les fables, qui peut incarner aussi bien le courage que la traîtrise, pour en appeler à l’unité de sa nation. Dans son ouvrage pédagogique Abécédaire (1875), Tolstoï publie notamment une fable intitulée « Le Loup et le Chien » qui est directement inspirée de « Le Chien endormi et le Loup » d’Ésope, une histoire dans laquelle le chien représente la sagesse et la ruse. L’auteur russe se dispense néanmoins d’y faire figurer une morale, laissant ses lecteurs développer leur esprit critique en déduisant eux-mêmes l’enseignement qu’il faut tirer de cette histoire.

 

Dans « Le Villageois et le Chien » (1843), son compatriote Krylov joue quant à lui sur le concept de confier un travail à un chien, un principe très présent dans les fables depuis l’Antiquité, pour dénoncer le cumul des mandats. Son texte se distingue par son humour, comme c’était d’ailleurs déjà le cas de « L’Éléphant et le Carlin » (1815), reprenant le concept développé au 18ème siècle d’un petit chien symbole de l’arrogance et de la vanité.

 

Cette dernière œuvre est d’ailleurs remarquable à plus d’un titre. En effet, elle est sans doute la première à mentionner la race d’un chien. En outre, l’animal en question est un simple compagnon domestique, et non un « assistant » employé par son propriétaire pour accomplir diverses tâches. En ce sens, elle est révélatrice d’un changement sociétal dans la façon de considérer cet animal, au moins dans un premier temps chez les familles aisées. Cela dit, c’est surtout dans la seconde moitié du 19ème siècle que ce phénomène s’amplifie fortement.

 

Au 20ème siècle, le dramaturge français Jean Anouilh (1910-1987) fait également des chiens de ses fables des personnages à la portée à la fois comique et politique. Ainsi, « Le Chien pelé » (1962), symbole de l’injustice, lui permet de renvoyer dos à dos ouvriers et patronat. « Le Lévrier » (1962) incarne quant à lui l’hypocrisie et la stupidité de membres des classes supérieures idéalistes et déconnectés des réalités de la rue qu’ils prétendent pourtant connaître.

Page 1 :
Le chien dans les fables
Par Muriel L. - Dernière modification : 06/05/2025.