Un chien est-il naturellement gentil ou méchant ?

Un chien est-il naturellement gentil ou méchant ?

« Le Rottweiler est un chien dangereux ! », « Le Bouledogue français, quel gentil chien ! », « Le Pitbull a un physique et un visage qui me font peur », « Un chien aussi mignon que le Saint-Bernard ne peut pas être méchant »... : qui n'a pas déjà entendu ce genre de phrases autour de lui ?


Les humains n'hésitent pas à discriminer certaines races au profit d'autres. Délit de faciès, "On dit" ou méconnaissance du langage canin participent à alimenter les préjugés sur certaines races, qui finissent par être considérées comme dangereuses.


Mais le chien est-il gentil ou méchant de naissance ? Quel est l'impact de la race sur son comportement ?

Le chien, victime de délit de faciès

Le chien, victime de délit de faciès

Quand ce ne sont pas de véritables légendes, propres à un fait particulier, les idées reçues et croyances circulent, mais aussi perdurent dans le temps. Elles ne sont toutefois pas sans raison d’être. Les unes expliquent, les autres rassurent, certaines solutionnent rapidement et facilement (comme les remèdes miraculeux de nos ancêtres) ou encore inquiètent plus que de raison. De nouvelles idées reçues et croyances apparaissent régulièrement, montrant là l’ampleur d’un phénomène somme toute loin d’être isolé. Une vie de chien n’y échappe pas, à commencer par les croyances et idées reçues en relation avec la morphologie du chien (perception visuelle du sujet).

Que ce soit un chien de race ou non, il est aisé et tentant pour l'Homme de catégoriser un chien en se basant simplement sur son aspect visuel, dont chacun a sa propre représentation. La couleur du pelage du chien peut, par exemple, évoquer la force ou la douceur. Une morphologie canine spécifique (athlétique, anguleuse, élancée…), associée à une couleur du pelage sombre, ou à l'inverse des formes arrondies associées à une couleur claire, chaleureuse, sont autant de critères qui risquent d’influencer la perception et donc le jugement. 

 

La morphologie du chien, lorsqu'elle s'y prête, engendre chez l'humain des a priori qui s'avèrent tenaces. Un chien de petite taille sera automatiquement classé dans la catégorie "chien gentil", alors qu'un chien sportif aux traits anguleux va susciter la méfiance chez l'humain. C'est ainsi que de nombreuses personnes se méfient ou ont peur de certaines races de chiens, comme le Dobermann, le Rottweiler, le Berger allemand ou encore le Berger de Beauce. Leur apparence, à travers une robe souvent d'un noir immaculé associée à des traits anguleux et une morphologie athlétique, peut assurément contribuer à ce sentiment de peur. Les couleurs de robes des chiens sont d'une grande importance dans la perception des humains, à tel point qu'un lynx aperçu dans un documentaire animalier peut susciter plus de sympathie qu'un chien, malgré un physique sportif et des traits fins et cassants.

 

Ce délit de faciès s'opère sans retenue, de manière ostensible, alors que ce même type de comportement est très mal perçu lorsqu'il est reproduit entre humains. Malheureusement, le chien, lui, continue souvent d'être considéré comme gentil ou méchant à l'aune de ses caractéristiques physiques. Pourquoi le chien fait-il ainsi l'objet d'une présomption de dangerosité, notamment en fonction de sa morphologie ? Sans doute parce que son espèce est différente de l'espèce humaine et que, de ce fait, il est difficile d'anticiper ses actions, car son fonctionnement est différent. Mais les Hommes maîtrisent-ils toujours ce qui se passe dans la tête de leurs congénères ?

Le chien agit en fonction de son environnement

Le chien agit en fonction de son environnement

L'agressivité d'un chien n'est pas une donnée ou une constante. Elle ne constitue pas une caractéristique de son tempérament ou un trait de caractère. Un comportement agressif se manifeste lorsqu'il se sent en danger ou menacé par un stimulus extérieur. Cette agressivité peut être justifiée ou non. Si ce n'est pas le cas, et en situation de récidive, un apprentissage doit s'opérer pour corriger cette attitude. Il ne faut jamais tarder ou attendre pour réagir quand se présente une conduite agressive, sous peine que cela devienne récurrent.

 

Pour autant, l'apparition d'un comportement agressif ne veut pas dire que le chien est doté d'un tempérament agressif. Il a simplement répondu à un stimulus extérieur en adoptant une posture agressive ou défensive ; cela n'implique aucunement qu'il est toujours comme ça.

 

Malheureusement, un chien qui sent que son maître le considère comme agressif va avoir tendance à renforcer ce comportement, car il adapte ses réactions en fonction de celles de son maître. Le cercle vicieux est lancé.

 

Ainsi, en fonction de la situation ainsi que de ses expériences antérieures, le chien adapte sa réaction, qui dans certains cas peut être agressive. Mais un chien peut très bien aboyer ou se montrer menaçant sans pour autant que ce type de comportement soit fréquent chez lui.

 

On voit donc qu'il n'est pas pertinent de considérer qu'un chien est intrinsèquement "gentil" ou "méchant". Il est tout à fait possible qu'un comportement agressif se manifeste chez un chien dit « gentil », au même titre qu'un comportement d'apaisement peut survenir chez celui dit « méchant ». Dès lors, il convient d’envisager avec un œil nouveau et un regard davantage critique tout propos évoquant la « gentillesse » d’un chiot ou d’un chien, en particulier quand elle est associée à la cohabitation du chien avec des enfants. D'ailleurs, la plupart des morsures de chiens sur des enfants son causées par le chien de la famille ou un chien de l’entourage proche (grands-parents, oncles et tantes, voisins…).

 

Au final, rien n’est plus imprécis, simpliste et dangereux que la croyance opposant de façon binaire « chien gentil » et « chien méchant ». En effet, personne n’est en mesure de prédire de manière aussi affirmative la réponse comportementale et individuelle d’un chien devant les sollicitations, tantôt douces ou brutales ,tantôt respectueuses ou envahissantes (souvent de manière inconsciente, au demeurant), d’un enfant, d’un adolescent, ou même d’un adulte de la famille.

 

Précisons aussi que le sexe du chien, son âge et sa race n'ont que peu d'influence sur sa propension à faire montre d'agressivité. Un chien peut être agressif pour de nombreuses raisons, mais son pedigree n'entre pas en ligne de compte.

L'anthropomorphisme dessert la relation entre l'Homme et le chien

L'anthropomorphisme dessert la relation entre l'Homme et le chien

L'anthropomorphisme n'aide pas à comprendre réellement la personnalité d'un animal. Le chien n'agit que très rarement comme un être humain, et faire preuve d'anthropomorphisme conduit précisément à passer à côté de ces différences. Lorsqu'une situation se déroule devant les yeux d'un chien, qui en soi n'est ni gentil ni méchant, il adopte une réaction qui est propre à son espèce, et prend en compte ses expériences passées. Elle ne ressemble jamais à ce qu'un humain ferait à la place du chien.

 

Dans le cadre de la vie en société, l'Homme élabore, pour se rassurer, un ensemble de règles de précautions, d'attitudes qui sont propres à l'espèce et permettent d'interagir pacifiquement et harmonieusement avec ses congénères. Le risque zéro n'existe pas, mais l'Homme sait qu'il doit apprendre le "bien vivre ensemble", car les interactions sont inévitables.
Le chien fonctionne de la même manière, mais avec une méthodologie qui est propre à son espèce. Les codes et modalités de cohabitation n'étant pas les mêmes, il y a un risque réel de malentendus dans les relations entre chiens et humains, a fortiori quand ces derniers ne sont pas conscients de ces différences.

 

L'anthropomorphisme dont font malheureusement preuve beaucoup de maîtres ne fait que renforcer la croyance dans la pertinence d'une classification entre « chien gentil » d'une part, « chien méchant » d'autre part, qui est pourtant totalement erronée. Ces caractéristiques sont propres à l'homme, pas au chien ! Le canidé n'appréhende pas le monde qui l'entoure de la même manière qu'un humain le fait ; sa réalité est différente. Faire montre d'anthropomorphisme pour analyser les comportements d'un chien emprisonne l'observateur dans une logique simpliste et erronée, méconnaissant totalement les particularités du comportement et faisant la part belle aux idées reçues et aux croyances.

 

De nombreux maîtres ne sont pas conscients d'être dans cette situation, et ont du coup tendance à agir envers leur chien de manière inadéquate. Sanctionner et punir son chien de manière non appropriée est une parfaite illustration des dégâts de l'anthropomorphisme sur la relation entre un maître et son chien. Par exemple, donner une fessée à son chien est une incongruité pour lui : un chien n'infligeant pas de fessée à un congénère, il ne peut pas comprendre la signification de cet acte.

 

Au final, comprendre et distinguer la réalité du chien par rapport aux attentes et représentations des humains à leur égard est un réajustement fort utile. D'une part, parce que derrière l'expression « Il a fait une grosse bêtise », qu'il s'agisse de destructions, de problèmes de malpropreté ou encore de vol de nourriture, peut se cacher une grande variété de situations et d'explications. D'autre part, pour éviter que ce qui est vu comme inacceptable par les humains, à l'instar des aboiements ou d'une agressivité envers les autres chiens, entraîne des réactions humaines inappropriées qui auraient pu être évitées par une bonne connaissance du comportement canin.

Le chien ne nuit pas intentionnellement

Le chien ne nuit pas intentionnellement

Chez le chien, contrairement à ce qui se fait parfois chez l'Homme, il n'y a pas d’intentionnalité de nuire. Ce qui apparaît aux yeux du maître comme une "bêtise" ou une "faute" ne sont, du point de vue du chien, que le résultat de sa propre relation au monde. Le chiot qui se soulage dans le salon a tout simplement besoin d’acquérir les critères humains de la propreté. Si on ne les lui inculque pas, il ne peut pas les deviner. Il est donc nécessaire d'apprendre à son chiot à devenir propre selon les critères humains, puisque la propreté d'un point de vue canin est différente. Le chien qui urine aux quatre coins de l’habitation, qui dégrade le mobilier ou même qui se montre agressif, attend simplement une réorganisation fine de son quotidien. 

 

Lorsque le chien commet ce que le maître perçoit comme étant une "bêtise", il n'en est pas conscient, il ne le fait pas « exprès ». Il n'a simplement pas encore acquis les codes de la société humaine, ou du moins certains de ces codes. Il n'est pas en mesure de discerner ce qui, aux yeux de son maître, est bon ou mauvais. Cela ne fait pas pour autant de lui un chien méchant, désobéissant ou agressif.

 

Dès lors, on comprend aisément que sanctionner un chien pour une bêtise ou une faute qu'il n'a pas conscience d'avoir commise est insensé. Cela ne veut pas pour autant dire qu'il faut que le maître se montre permissif et insouciant. Simplement, il doit être conscient que son compagnon ne perçoit pas le monde de la même manière que lui, et faire preuve de pédagogie, de patience et de tact pour que son chien finisse par apprivoiser les attentes humaines.

Quel est le rôle du maître ?

Quel est le rôle du maître ?

Chef de meute, perçu comme un véritable guide par le chien, le maître doit apporter toute son expérience et son savoir à son compagnon. Cela passe par deux points essentiels :

 

  • Il doit établir les règles nécessaires à la vie collective, et s'assurer qu'elles soient lisibles. Ces règles sont propres à chaque maître et dépendent notamment de la relation qui le lie à son compagnon ;

  • Il doit accorder du temps à son chien, en étant présent à ses côtés, en jouant avec lui, en effectuant des promenades avec le chien, et diverses autres activités permettant de le stimuler. Solliciter son odorat, lui faire rencontrer de nouveaux congénères et lui procurer des émotions permettent de donner confiance à son chien.

  

En clair, le rôle du maître ne saurait se cantonner à fournir à son chien un grand jardin, des accessoires et jouets sympathiques, et une alimentation de qualité.

 

Et même si le chien adopte des comportements agressifs, il est important de bien garder à l'esprit que ce n'est pas dans sa nature d'être agressif. Cette posture n'est qu'une réponse à un stimulus extérieur. Charge au maître de passer du temps pour analyser et décrypter les circonstances exactes de ce mouvement d'humeur, afin de mettre en place des actions visant à éviter que ceci se produise à nouveau. 

 

Les causes peuvent être multiples : souffrance physique (potentiellement liée à une maladie), irritabilité, peur ou phobie (durable ou soudaine), stress, frustration, etc. Ces crises sont difficiles à comprendre pour l'humain, car le chien n'a pas la faculté de verbaliser son mal-être. Si le maître ne perçoit pas ce que veut lui dire son chien, ce dernier accentuera ses mauvais comportements pour se faire comprendre. C'est ainsi que le gentil toutou peut se transforme progressivement, aux yeux du maître, en un prédateur dangereux.

 

La médiation apporte une écoute et un éclairage permettant de comprendre et rectifier les comportements que le maître juge mauvais, en prenant en compte l'éventuelle part de responsabilité de ce dernier. Cette médiation peut se faire en ayant recours à un comportementaliste canin professionnel, qui aide à comprendre la situation et apporte les clés pour rétablir une relation saine entre le maître et le chien.

Conclusion

On ne peut pas prédire le comportement d'un chien simplement en le regardant, et donc le considérer a priori comme étant gentil ou méchant, dangereux ou inoffensif. Le maître a une influence majeure sur le comportement de son animal, non seulement par sa propre attitude, mais aussi et surtout par l'éducation de son animal, sa socialisation, et le fait de l'habituer (ou le désensibiliser) à une très grande variété de stimulus auxquels il risque d'être confronté. 

 

Un chien n'est pas agressif naturellement. Il n'adopte un tel comportement que lorsqu'il se sent mal à l'aise, agressé ou menacé, en tant que réaction défensive. Malheureusement, on ne peut pas prédire les stimulus auxquels il peut être confronté, et l'effet de surprise explique bien souvent le comportement agressif du chien. 

Dernière modification : 11/13/2018.

Commentaires sur cet article

J'avais un jour mon bébé assise par terre, en Train de découvrir de plus près mon croisé labrador assis tranquillement lui aussi, devant elle et moi à coté. un bruit soudain fait tourner la tête d au chien, et son croc qui dépassait vient malencontreusement cogner la tête de ma fille. Il ne l'avait pas fait exprès, et semblait vraiment désolé et très malheureux de la situation. Je me suis retrouvée en train de les consoler tous les deux.
Je ne pense pas qu'il ait eu la même interprétation que moi, mais il avait bien fait le rapport entre son mouvement brusque et les pleurs du bébé. Il a fallu que je le rassure en lui assurant que je savais qu'il ne l'avait pas fait exprès, tout en consolant mon enfant. Du coup, j'en avais deux à consoler à la fois !
Rassurez vous elle va très bien et à une jolie petite fille.
Le même chien était gourmand comme tout labrador qui se respecte. Je ne sais pas s'il savent ou non s'il ont fait une bêtise, mais on le voyait parfois traverser la pièce non loin de nous en s'aplatissant tant qu'il pouvait, on se disait alors "Tiens, il vient de faire une bêtise !" Grave ou pas, il savait qu'il avait fait quelque chose qui ne nous plairait pas. Au lieu de passer d'un air naturel, toute sa personne canine nous informait de la chose. J'ai oublié la plupart de ses bêtises mais pas les rires qu'il provoquait.
Il me semble que les chiens comprennent souvent bien plus de choses qu'on ne pense. J'ai toujours beaucoup parlé à mes animaux et continuerai à la faire, convaincue que dans le tas, l'information passe.

   
Par CocciNim
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