Les chiens à la queue en tire-bouchon

La queue du chien est normalement constituée d'une vingtaine de petites vertèbres.

Ces dernières sont censées avoir une forme globalement rectangulaire. Toutefois, dans certains cas, une ou plusieurs d'entre elles sont sujettes à une malformation d'origine génétique et prennent d'autres formes : elles sont alors triangulaires, ou fusionnées entre elles. Lorsque cela se produit, la queue s'enroule sur elle-même au fur et à mesure que l'animal grandit, jusqu'à former potentiellement deux boucles. Le phénomène est d'autant plus prononcé que le nombre de vertèbres concernées est important.

Il s'agit d'une évolution morphologique qui n'est pas douloureuse pour l'intéressé et qui serait naturellement apparue au fil des siècles. Elle est plus courante chez les races originaires de pays froids et/ou utilisées depuis longtemps comme chien de traîneau. Plusieurs raisons sont évoquées pour l'expliquer, la principale étant que cette particularité éviterait que la queue de l'animal traîne au sol lorsqu'il court dans la neige ou tracte une charge.

Cette forme particulière se retrouve aussi chez un certain nombre d'autres races : c'est le cas en particulier de la plupart des chiens de type spitz, comme le Loulou de Poméranie ou le Shiba Inu. Son rôle est surtout esthétique : non contente d'être originale, une queue en tire-bouchon est une marque d'élégance - notamment lorsqu'elle forme une sorte de plumeau.

Même si sa forme est étrange et biscornue, une queue en tire-bouchon ne nécessite nullement de s'inquiéter : elle ne cause aucune douleur au chien, et plus généralement n'a aucun impact sur sa santé. Il faut simplement veiller à ne pas tirer dessus (par exemple pour tenter de la dérouler), car cela risquerait d'être très douloureux pour lui - voire de le blesser.

En revanche, elle n'est pas totalement neutre sur le plan comportemental.

En effet, il est de notoriété publique qu'un chien utilise sa queue pour communiquer, que ce soit avec ses congénères ou avec les humains. Il peut ainsi la remuer pour transmettre sa joie ou au contraire son stress, la placer entre ses pattes pour indiquer sa peur ou sa soumission, la tenir bien droite quand il est attentif ou concentré, etc.

Or, la capacité de mouvement de sa queue est réduite dès lors qu'elle est en tire-bouchon. Il peut tout de même la remuer un peu - notamment lorsqu'il est content -, mais ne peut effectuer les mêmes mouvements que ses congénères. Cette particularité constitue donc un petit handicap pour lui en termes de communication.

Cela dit, il faut garder en tête que le langage corporel d'un chien ne se limite pas aux mouvements de sa queue : de nombreuses autres parties de son corps permettent de connaître son état d'esprit. Par exemple, la position de ses oreilles, son regard, un éventuel sourire ou encore la posture de son corps peuvent en dire beaucoup. Autrement dit, même s'il ne peut utiliser pleinement son appendice caudal, cela ne l'empêche pas vraiment de transmettre ses émotions à ses congénères par d'autres moyens, et ne le gêne donc pas spécialement au quotidien.

Il en va d'ailleurs de même pour les chiens sans queue, qui sont confrontés au même problème mais n'en souffrent pas vraiment non plus : ils utilisent simplement davantage d'autres parties du corps pour communiquer avec leur entourage.

Même si techniquement n'importe quel chien de n'importe quelle race pourrait avoir une queue en tire-bouchon, cette particularité se retrouve surtout au sein de quelques races en particulier - principalement des spitz, mais pas uniquement.

Voici une petite présentation de dix d'entre elles, ainsi que quelques-unes de leurs caractéristiques les plus remarquables.

Emblème canin du pays du Soleil levant, le Shiba Inu est une race assez petite, mais qui a tout de même conservé une certaine noblesse héritée de son ancêtre le loup. Il faut dire qu'il ressemble beaucoup à ce dernier, en plus petit : il possède ainsi notamment un pelage court mais dense, un corps musclé, un museau allongé ainsi que des oreilles triangulaires portées droites.

Il s'en distingue toutefois entre autres par le fait d'arborer comme la plupart des autres spitz une queue enroulée sur elle-même, qu'il porte fièrement sur son dos. Quant à sa robe, elle est généralement urajiro (c'est-à-dire colorée sur le dessus et blanche sur le dessous du corps), mais arbore parfois d'autres couleurs : on trouve par exemple des spécimens intégralement blancs.

Bien qu'il soit particulièrement calme et sage en apparence, le Shiba Inu n'est pas spécialement docile ni obéissant. Il possède en fait un caractère bien trempé : satisfaire les désidératas de son maître est loin d'être son obsession, et il  n'obéit à ce dernier que s'il en a envie. Cela ne signifie pas qu'il soit stupide : sa grande intelligence le rend parfaitement capable de comprendre les ordres qu'on lui donne, mais elle lui permet aussi de juger par lui-même de leur bien-fondé. Autant dire que s'il trouve une demande inutile ou rébarbative, il y a peu de chances qu'il l'exécute avec entrain.

Aisément reconnaissable à sa face écrasée et son pelage ras généralement couleur sable, le Carlin fait partie des quelques races à la queue en tire-bouchon qui n'appartiennent pas à la famille des spitz. Celle-ci s'enroule peu à peu au cours de la croissance, jusqu'à finir le plus souvent par former une voire deux boucles. Ce dernier cas de figure est très recherché.

Comme beaucoup de chiens au nez écrasé, le Carlin a un visage rond et semble sourire en permanence. Son museau est de couleur sombre, presque noire, tout comme le contour des yeux et l'arrière des oreilles : c'est ce que l'on appelle un masque. Quant au corps, il est trapu et compact, sans pour autant paraître gras ou court sur pattes.

Apprécié pour sa sociabilité et sa bonne humeur, le Carlin est un très bon choix pour toute personne cherchant un compagnon domestique. En revanche, ce n'est pas une race sportive, même s'il aime beaucoup jouer avec ses humains ou avec des congénères. Il a tendance quand même à se montrer particulièrement énergique quand il est petit, mais se calme en grandissant et est alors simplement enjoué et joyeux.

Véritable petite peluche vivante, le Loulou de Poméranie (aussi appelé Pomeranian ou Spitz Nain) a tout pour lui : une adorable bouille trop mignonne, de gros yeux ronds, une longue fourrure cotonneuse et toute douce, et pour parfaire l'ensemble, une jolie queue repliée sur elle-même en forme de pompon. Il n'est vraiment pas bien grand, mais dispose de sérieux atouts pour faire chavirer les coeurs - ce qu'il réussit d'ailleurs très bien.

Il est souvent roux, ce qui lui vaut de faire partie des chiens ressemblant le plus à un renard - et c'est d'ailleurs la robe la plus recherchée. Néanmoins, son pelage peut aussi arborer toutes sortes d'autres couleurs : blanc, noir, marron, gris...

Particulièrement apprécié comme chien de compagnie en raison de sa gentillesse et de sa bonne humeur, le Loulou de Poméranie possède un caractère plus agréable et conciliant que la plupart de ses congénères de taille comparable. Cela ne signifie pas pour autant qu'il faille tout lui passer, car il aurait alors tôt fait de prendre ses aises et de se montrer désobéissant. Autrement dit, son apparence adorable ne doit pas dispenser de l'éduquer correctement et de lui fixer des limites.

Aisément reconnaissable à son pelage ras et ses grandes oreilles de chauve-souris, le Basenji est une des rares races de chiens originaires d'Afrique. Comme la plupart de ses congénères appartenant à la famille des spitz, il est doté d'une queue en tire-bouchon qu'il porte élégamment sur son dos. Lorsque celle-ci est très enroulée, elle forme même une double boucle.

Le Basenji est souvent bicolore, mais il peut arborer aussi une robe unie ou tricolore. Dans tous les cas, son pelage est toujours court, ce qui met en valeur sa silhouette fine mais musclée. Quant à ses yeux, ils sont généralement noirs - ou en tout cas très foncés - et dotés d'une expression impénétrable.

Ce chien n'est pas connu pour être particulièrement expressif, bien au contraire. Cela ne l'empêche toutefois pas de tisser des liens très forts avec sa famille - en particulier avec la personne qui s'occupe le plus de lui, et qu'il considère comme son maître. Mieux vaut d'ailleurs que celle-ci soit assez disponible, car il a besoin de beaucoup d'exercice chaque jour pour être bien dans sa peau. Pour autant, il possède un caractère très indépendant, qui lui permet de s'occuper facilement lorsqu'il se retrouve seul : il est moins sujet à l'anxiété de séparation que nombre de ses semblables.

Sorte de version grande taille du Shiba Inu, une autre race japonaise qui connaît une popularité croissante en Occident, l'Akita Inu est comme ce dernier doté d'une belle queue épaisse et enroulée sur elle-même. Du fait de la longueur de ses poils, celle-ci forme un élégant pompon sur son dos : elle est plutôt longue, et atteint quasiment le jarret lorsqu'on la déroule.

En dehors de cette particularité, l'Akita ressemble à une grosse peluche, en raison notamment de son allure de nounours et de sa fourrure dense. Sa robe est généralement urajiro, c'est-à-dire colorée sur le dessus du corps et blanche en-dessous. Ses oreilles sont triangulaires, de petite taille, plantées assez bas sur le crâne, et plutôt tournées vers l'avant.

Bien qu'il ait actuellement le vent en poupe en Europe, l'Akita n'est pas connu pour avoir un caractère très conciliant et être facile à prendre en main. Il est certes calme et très intelligent, mais est loin d'être un modèle de docilité : il se montre au contraire volontiers têtu, n'obéissant que s'il en a envie. En plus de cela, il s'entend assez mal avec ses congénères, en raison de son tempérament dominant. Autant dire que si on opte pour cette race, il faut s'attendre à devoir gérer régulièrement des bagarres entre chiens...

Aussi appelé Spitz-Loup en raison de sa ressemblance avec le canidé éponyme, le Keeshond appartient comme son nom l'indique à la famille des spitz. Il n'est donc pas surprenant que, comme la plupart des autres races de ce type, il possède une queue en forme de tire-bouchon, portée rabattue sur le dos. Celle-ci est de taille moyenne, frangée, et de la même couleur que le reste du corps (c'est-à-dire grise) sauf au niveau de son extrémité, où elle est noire.

En dehors de cela, c'est un chien de taille moyenne, musclé mais moins trapu que ce que son pelage volumineux pourrait laisser croire. Sa tête est typique des spitz, avec un nez allongé et des oreilles triangulaires.

Il n'y a pas que sur le plan morphologique que le Keeshond est proche du loup : cela vaut également pour son caractère. Il est en effet intelligent, naturellement méfiant envers les inconnus et plutôt indépendant - même s'il tisse un lien fort avec sa famille. Ces caractéristiques font de lui un bon chien de garde, attentif et vigilant. Enfin, son besoin d'exercice est assez modéré ; il peut d'ailleurs très bien s'accommoder d'une vie en ville, même s'il préfère la campagne.

Moins connu que ses cousins le Shiba Inu et l'Akita Inu, l'Hokkaido Ken est un beau spitz plutôt haut sur pattes et d'apparence robuste. Sa longue silhouette musclée se termine par une jolie queue enroulée sur elle-même jusqu'à former une faucille ou un tire-bouchon. À cause de sa forme, elle semble plutôt courte ; pourtant, lorsqu'elle est entièrement dépliée et abaissée le long de la patte, elle atteint quasiment le jarret.

Le pelage de ce chien est plutôt court, mais suffisamment dense pour lui permettre de supporter les rudes hivers de sa région natale - l'île japonaise d'Hokkaido, située au nord du pays et qui lui a donné son nom. Il est particulièrement apprécié lorsqu'il est blanc comme la neige. Il peut toutefois aussi être roux, noir, bringé (c'est-à-dire rayé), bicolore ou encore sésame.

En plus de sa sympathique apparence de grosse peluche, l'Hokkaido a aussi l'avantage de posséder un caractère bien plus agréable que celui de bon nombre de spitz. Il est en effet docile, obéissant, et affectueux sans pour autant se montrer envahissant. Par ailleurs, sa méfiance envers les étrangers fait de lui un bon gardien - d'autant qu'il est naturellement protecteur envers sa famille. Il a toutefois l'inconvénient de s'entendre globalement mal avec les autres animaux, qu'il s'agisse de congénères ou de représentants d'autres espèces. Mieux vaut donc qu'il soit le seul animal du foyer, au risque de devoir régulièrement gérer toutes sortes de conflits.

Ressemblant fortement à une version miniature du Husky Sibérien (dont il descend), l'Alaskan Klee Kai est une race récente, puisqu'il fut développé dans la seconde moitié du 21ème siècle. Il fait partie de la famille des spitz, et possède une queue enroulée sur son dos à la manière d'une faucille ou d'un tire-bouchon. Celle-ci se termine le plus souvent par une touffe de poils noirs, le reste étant traditionnellement gris sur le dessus et blanc en dessous.

Il fait partie des chiens qui ressemblent le plus à un loup : sa tête arbore des oreilles dressées ainsi qu'un museau allongé, tandis que son pelage dense et généralement grisâtre n'est pas sans rappeler celui de son ancêtre. Sa principale différence avec ce dernier se situe au niveau de la taille : l'Alaskan Klee Kai est nettement plus petit, au point que son poids à l'âge adulte ne dépasse pas une dizaine de kilos.

Côté caractère, il est indubitablement plus proche des autres chiens que du loup. En effet, contrairement au Husky Sibérien, il est destiné davantage à la compagnie qu'au travail : il a donc été sélectionné pour être affectueux, jovial et agréable. Il tolère d'ailleurs plutôt bien la présence de congénères dans le foyer ; ces derniers sont même généralement les bienvenus, car ils constituent pour lui autant de compagnons de jeu potentiels. Il faut dire qu'il ne manque pas d'énergie malgré sa petite taille, et qu'il peut rapidement s'ennuyer s'il n'est pas assez stimulé tant physiquement qu'intellectuellement.

Très apprécié pour son beau pelage intégralement blanc, le Samoyède est un spitz d'apparence compacte et musclée. Il semble beaucoup plus volumineux qu'il ne l'est réellement en raison de sa fourrure très dense, qui le protège efficacement pendant la saison froide et forme une crinière plus ou moins fournie autour du cou. Elle recouvre aussi notablement sa queue en tire-bouchon pour former une sorte de gros pompon sur le dos.

En dehors de cela, le museau est très allongé (comme souvent chez les spitz) et les oreilles sont dressées, comme chez le loup. Seuls sa fourrure blanche et cotonneuse, son air jovial et son sourire permettent de ne pas le confondre avec ce dernier et de ne pas laisser de doute quant au fait qu'il s'agit bel et bien d'un chien.

Son tempérament est également très différent de celui de son lointain ancêtre. Il s'agit en effet d'une race chaleureuse, amicale et agréable à vivre dès lors que ses besoins sont comblés. Parmi ceux-ci figure notamment le fait de ne pas se retrouver trop souvent seul, car il s'attache beaucoup à sa famille et souffre facilement de l'absence de celle-ci. En outre, il ne supporte pas de rester inactif : c'est un chien très sportif, qui a besoin de se dépenser longuement chaque jour pour se sentir bien dans ses pattes et dans sa tête.

Probablement l'un des spitz les moins connus et répandus, le Spitz Finlandais est un beau chien roux possédant une queue bien fournie et enroulée sur elle-même, ainsi qu'un museau pointu. Ces particularités lui valent d'être souvent comparé à un renard : pourtant, c'est en réalité davantage du loup qu'il tient. Comme ce dernier, il est plutôt haut sur pattes et est doté d'un corps à la fois fin et musclé, ainsi que de larges oreilles bien droites.

Sa belle fourrure est probablement sa caractéristique la plus remarquable ; sa teinte va du rouge au doré, avec éventuellement quelques taches blanches sur les pattes et/ou le poitrail. Comme souvent, le dessous du corps est d'une couleur plus claire que le reste, sans être blanc pour autant.

Utilisé pendant des siècles pour la chasse au gibier de taille moyenne à grande, le Spitz Finlandais a conservé un fort instinct de prédation : il n'est donc pas un bon choix s'il y a déjà à la maison un petit animal (chat, rongeur...). Il n'est pas fait non plus pour vivre en ville, et ne saurait même se satisfaire d'un petit jardin : il lui faut de grands espaces pour pouvoir se dépenser à sa guise. L'idéal pour lui est une vie à la campagne auprès d'un maître sportif en mesure de l'emmener avec lui lors de ses entraînements.

Si les chiens à la queue en tire-bouchon sont aussi remarquables, c'est notamment parce qu'ils relèvent plus de l'exception que de la règle : parmi les centaines de races qui existent à travers le monde, seules une poignée possèdent cette particularité.

La plupart des autres chiens ont en effet une queue soit droite, soit courbée pour former un S ou un J. Cela dit, une certaine diversité est à l'oeuvre quant à la façon dont elle est portée : chez certaines races, elle est plutôt relevée au-dessus du dos ; chez d'autres, elle est tournée vers le bas - voire baissée entre les pattes - ; chez d'autres encore, elle plutôt droite et dans le prolongement du corps - si bien d'ailleurs qu'elle paraît alors souvent plus longue qu'elle ne l'est réellement.

Pour autant, il existe aussi des chiens à la queue très courte, voire qui n'en ont pas du tout. Cette particularité peut soit correspondre à une évolution naturelle (comme pour les races chez qui elle est enroulée), soit tout simplement au fait qu'elle a été coupée par un humain peu après la naissance - une pratique contestée appelée caudectomie.

Au final, le port et la forme de la queue font partie des traits spécifiques de chaque race, contribuant éventuellement à son charme - en fonction des goûts de chacun(e).