Les courses de chiens de traîneau ayant connu une popularité croissante, il en existe des centaines aux quatre coins de la planète. Les mushers, et notamment ceux de plus haut rang mondial, doivent donc choisir stratégiquement auxquelles ils font participer leur attelage.
Parce que ce sont les plus difficiles, et à ce titre peut-être les plus représentatives de ce que peut être une telle course, et pour tous les rêves qu’elles suscitent depuis leur création, trois courses s’imposent comme les plus prestigieuses : l’Iditarod et la Yukon Quest en Amérique du Nord, ainsi que La Grande Odyssée Savoie-Mont Blanc en Europe.
Créée en 1973 en hommage au célèbre Serum Run de 1925, l’Iditarod Trail Sled Dog Race a lieu chaque année en Alaska, entre Anchorage et Nome. Le premier samedi de mars, une centaine de mushers, venus de plus de 12 pays avec pas moins de 1600 chiens, prennent le départ au rythme d’un équipage toutes les deux minutes, pour une course qui dure entre 8 et 15 jours, parfois plus.
Avec ses 1750 kilomètres à parcourir, l’Iditarod est la plus longue et la plus difficile des courses de chiens de traîneaux. Il est d’ailleurs nécessaire d’avoir déjà fait au moins une fois la Yukon Quest (en version normale ou en version raccourcie) pour être autorisé à y participer. La majeure partie de l’Iditarod se fait en totale autonomie, car il n’y a que 20 à 30 points de contrôle tout au long du parcours – le nombre exact est susceptible de varier d’une année à l’autre, en fonction de l’enneigement. Cela signifie que les équipages sont livrés à eux-mêmes pendant plus de 1500 kilomètres, franchissant des étapes distantes de 60 à 80 kilomètres les unes des autres sans pouvoir recevoir d’aide extérieure.
Empruntant les anciennes pistes de courrier et de ravitaillement de la Ruée vers l’or, ils traversent des paysages variés : taïga, montagnes, banquise, fleuves gelés et petites villes isolées, avec des températures qui peuvent descendre jusqu’à -55° et des vents soufflant parfois à plus de 100 km/h. Malgré ces conditions extrêmes, la vitesse moyenne des attelages est d’environ 15 km/h.
Selon les années, la course emprunte deux tracés différents : les années impaires, elle passe par le sud, tandis qu’elle empreinte le parcours nord les années paires. Ce dernier a été ajouté pour inclure dans l’aventure des villes et des villages isolés le long du fleuve Yukon. Dans les deux cas, le parcours comprend des kilomètres et des kilomètres d’étendues sauvages, à tel point que le règlement de l’Iditarod (et celui de Yukon Quest, aux caractéristiques comparables) oblige les mushers à éviscérer et à déclarer du gros gibier (orignal, caribou, buffle…) qu’ils auraient été obligés d’abattre pour se défendre. S’il s’agit d’un autre animal sauvage, ils doivent juste le déclarer. C’est dire si cette nature, bien que grandiose, peut se montrer hostile. Au-delà des animaux sauvages, le froid et les crevasses sont autant de dangers potentiels pour les équipages, mais cela fait partie de l’aventure.
Au départ de la course, les attelages peuvent compter jusqu’à 16 chiens, et il faut rallier l’arrivée avec au minimum six chiens attelés. Tout au long du parcours, il est donc possible de déposer des chiens fatigués ou blessés à des points de contrôle. En revanche, il n’est pas possible de les remplacer, ce qui explique la taille conséquente des attelages au départ de l’épreuve.
Le règlement implique aussi que les mushers emmènent avec eux jusqu’à 150 kg d’équipements et de provisions pour leurs chiens et pour eux. La plus grande partie des provisions, ainsi que la paille pour la litière des chiens, est fournie aux différents points de contrôle par leurs équipiers, mais ils doivent néanmoins emporter dans le traîneau suffisamment de provisions pour être en mesure de nourrir leurs bêtes entre deux points de contrôle éloignés, ainsi que l’équipement pour le bivouac (tente, réchaud, hache, de quoi couvrir les chiens, etc.).
Le règlement de la course impose deux arrêts obligatoires, le premier de 24 heures et le second de 8 heures, dans n’importe quel point de contrôle. Les autres arrêts et leur durée sont laissés à l’appréciation du musher. C’est lui qui décide quand et ou stopper l'attelage et bivouaquer. Le bivouac est l’occasion pour tout le monde de se restaurer et de se reposer.
Les chiens récupèrent normalement en 4 ou 5 heures, et le musher aligne son temps de sommeil sur eux. Ils ont besoin d’un apport quotidien de 10.000 calories, ce qui correspond à peu près à 5 kg de viande, et sont nourris avec des croquettes très enrichies faites spécialement pour eux. Entre deux repas, toutes les 2 heures environ, le musher leur donne également des barres énergétiques. Quant à l’eau, il faut compter au moins un litre par jour et par chien.
Après des centaines de kilomètres parcourus dans des conditions extrêmes, la dernière étape, qui commence à Knik Lake, là où se situe le dernier point de contrôle, est accessible aux spectateurs. Ils sont nombreux à venir encourager les humains et leurs chiens jusqu’à l’arrivée.
À Nome, l’arrivée officielle est matérialisée par une arche en bois. Les concurrents les plus rapides mettent en général entre 9 et 12 jours pour la rallier, mais en 2017 Mitch Seavey battit un record avec 8 jours, 3 heures, 40 minutes et 13 secondes. Chaque arrivée est précédée d’un coup de sirène et, de jour comme de nuit, la foule se presse pour féliciter les équipages, quel que soit leur classement.
Les frais d’inscription à l'Iditarod s’élèvent à 3 000 dollars (environ 2 700 euros). Les gains représentent un pourcentage de la « cagnotte », qui est variable selon les années, et qui est alimentée notamment par les sponsors, les inscriptions et les produits dérivés. En 2018, le premier arrivé gagnait un peu plus de 50 000 dollars (environ 45 000 euros). Au-delà de la 30ème place, tout participant parvenant à rallier la ligne d’arrivée perçoit un gain de 1 000 dollars, soit un tiers de ses frais d’inscription.
Chaque année, environ 20% des concurrents abandonnent en cours de route, que ce soit du fait des conditions très éprouvantes, de blessures trop nombreuses des chiens, ou encore parce qu’ils se perdent.