L'histoire du Chesapeake Bay Retriever

La genèse du Chesapeake Bay Retriever

Le Chesapeake Bay Retriever est un chien de chasse de taille moyenne qui fut développé au début du 19ème siècle sur la côte nord-est des États-Unis, plus précisément dans la baie de Chesapeake, entre les états de Virginie et du Maryland.

 

Tout commença en 1807, lorsqu'un navire anglais fit naufrage sur la côte du Maryland. Il transportait deux chiots Terre-Neuve qui avaient été sélectionnés pour être exportés en Angleterre : Sailor, un mâle brun, et Canton, une femelle noire. Cette race était utilisée à l’époque sur l’île dont elle porte le nom (située à l’est du Canada) pour chasser le gibier d’eau et rapporter les débris des naufrages. Elle était toutefois plus petite et arborait un poil plus court qu'aujourd’hui.

 

Les chiots furent sauvés, et le capitaine du navire, un certain George Law, les confia à John Francis Mercer, ancien gouverneur du Maryland, et au Dr James Stuart, pour les remercier d’avoir accueilli les marins naufragés. Vivant de part et d’autre de la baie de Chesapeake, ces deux hommes étaient de grands chasseurs de gibier d’eau et ne tardèrent pas à apprécier les qualités de leur chien en la matière. Sans se concerter, chacun entreprit de développer et d’améliorer ses qualités de travail en procédant à des croisements avec des chiens de chasse locaux. Bien qu’on manque de documentation précise sur les races utilisées, on pense qu’il s’agissait de Retrievers à Poil Bouclé (Curly-Coated Retriever), de Retrievers à Poil Plat (Flat-Coated Retriever), de Chiens d’Eau Irlandais, d’une ou plusieurs races de setters ainsi que de chiens de loutre.

 

L’objectif était de répondre aux besoins des chasseurs qui évoluaient dans une zone très particulière et rude : la baie de Chesapeake. Longue d’environ 320 kilomètres, peu profonde et entourée de marais, elle emmagasine peu la chaleur, et ses eaux aux forts courants sont glaciales du début de l’hiver jusqu’au printemps. Malgré un environnement et un climat peu favorables, les chasseurs y ont toujours été nombreux, car elle est située le long d’un couloir de migration d’oiseaux sauvages. Chaque année, elle accueille ainsi un tiers des oiseaux migrateurs (notamment des canards et des oies) qui viennent passer l’hiver sur la côte est des États-Unis.

 

À l’époque, certains y chassaient pour le plaisir, mais d’autres vendaient le gibier qu’ils avaient abattu. Ces derniers avaient besoin d’un chien capable à la fois de rapporter un grand nombre d’oiseaux (ils en tuaient entre 200 et 300 par jour) et de monter la garde auprès des chariots dans lesquels ils les entreposaient lorsqu'ils allaient vendre dans les villages des environs.

 

Le Chesapeake Bay Retriever fut donc développé pour évoluer et chasser efficacement dans des eaux tumultueuses et glacées (il doit souvent casser de la glace pour rapporter le gibier), ainsi que dans la boue profonde des marais avoisinants. Il fallait aussi qu’il soit doté d’un très bon flair, afin de retrouver facilement le gibier abattu, et qu’il ait un instinct protecteur assez fort pour garder les biens des chasseurs.

 

Cela dit, à cette époque, la nourriture et les abris étaient rares pour les chiens : ils ne bénéficiaient pas d’autant d’attentions que de nos jours. De ce fait, seuls les plus résistants survivaient. En plus des différents croisements, la sélection naturelle joua donc aussi un rôle dans l’évolution de la race, et contribua à aboutir à la fin du 19ème siècle au chien que l’on connaît encore aujourd’hui, qui reste toujours aussi parfaitement adapté à ce type d’environnement.

 

Bien qu’on ne sache pas avec certitude quelles races furent croisées avec chacun des Terre-Neuve, les lignées obtenues de part et d’autre furent jugées si semblables qu’elles furent considérées comme appartenant à une même race lorsqu'en 1877 elles furent présentées à la première édition du Westminster Kennel Club Dog Show, à Baltimore (Maryland).

 

Chasseur exceptionnel vite renommé pour son endurance et sa détermination, le Chesapeake Bay Retriever était né - même si à l’époque on l’appelait souvent « chien de la Baie ». Il fit ainsi partie de la dizaine de races reconnues par l’American Kennel Club (AKC) lors de sa fondation en 1878. Un premier standard fut publié en 1890, et la race se stabilisa à la fin du 19ème siècle. Il fallut toutefois attendre 1918 pour qu’un club de race voie le jour, l’American Chesapeake Club (ACC).

La diffusion du Chesapeake Bay Retriever dans son pays d'origine

On ne sait pas exactement comment le Chesapeake Bay Retriever se fit connaître à travers les États-Unis, mais il est probable que des récits de chasseurs vantant ses qualités aient contribué très tôt et plutôt efficacement à sa diffusion. Par exemple, le général George Custer (1839-1876), connu pour son rôle dans les guerres contre les tribus amérindiennes, en posséda au moins un.

 

La participation de la race à la première édition du Westminster Kennel Club Dog Show en 1877 y fut certainement aussi pour quelque chose, ainsi que sa reconnaissance dès l’année suivante par le tout jeune American Kennel Club (AKC). Il fut également sur le devant de la scène en 1902, lorsque le président Theodore Roosevelt acquit un mâle nommé Sailor Boy.


Toutefois, le Chesapeake Bay Retriever ne devint réellement populaire et répandu aux États-Unis qu’au cours du 20ème siècle. Il fut reconnu par le United Kennel Club (UKC) en 1927, et sa popularité atteignit son apogée des années 30 aux années 50, période pendant laquelle il se diffusa à travers le pays.

 

Cependant, cet engouement eut également des effets négatifs, car certains éleveurs se mirent alors en tête de créer deux variétés distinctes : l’une destinée aux expositions, et l’autre au travail. Cependant, en privilégiant un aspect au détriment des autres, ils obtinrent des chiens qui s’éloignaient trop du standard : ceux appartenant à la variété d’exposition étaient esthétiques mais avaient perdu la force et la puissance, tandis que les autres étaient très athlétiques mais avaient perdu la beauté. L’ACC décida alors de mettre fin à ces pratiques, et y parvint effectivement.

La diffusion internationale du Chesapeake Bay Retriever

Contrairement à ce qui se passa au sein de son pays d’origine, le Chesapeake mit un certain temps à se diffuser à l’international.

 

Cela explique sa reconnaissance assez tardive par la Fédération Cynologique Internationale (FCI), qui ne survint qu’en 1964. Le Kennel Club britannique en fit de même sept ans plus tard, en 1971 – ce qui illustre là aussi le fait que ce chien mit beaucoup de temps à trouver sa place hors de ses terres d’origine.

 

Bien évidemment, la date à laquelle il fit son entrée diffère d’un endroit à l’autre. Par exemple, en France, l’importation d’un premier spécimen remonte à 1948, alors qu’en Suisse la première portée à voir le jour naquit en 1975.

 

En tout cas, la reconnaissance de la race par la FCI eut évidemment un impact sur sa diffusion à l’international, étant donné qu’elle encadre plus d’une centaine d’organismes cynologiques nationaux – dont ceux de la France (Société Centrale Canine, ou SCC), de la Belgique (Société Royale Saint-Hubert, ou SRSH) et de la Suisse (Société Cynologique Suisse, ou SCS).