Chaque année, les humains font face à des épidémies de grippe, notamment pendant la période hivernale : c'est désormais devenu une routine à laquelle chacun s'est habitué. Ce que l'on sait moins en revanche, c'est qu'il existe aussi des grippes qui touchent certains mammifères, notamment le chien : on parle alors de grippe canine.
Cette maladie respiratoire ressemble beaucoup à la grippe humaine, avec des symptômes globalement proches. Elle est souvent assez bénigne, mais peut devenir grave en cas de complication.
Quels sont les symptômes de la grippe chez le chien ? Existe-t-il des traitements permettant de le soigner ? Un chien peut-il transmettre la grippe à un humain, ou inversement ?
Le mot « grippe » (ou « influenza ») est en réalité un terme générique désignant un ensemble de maladies contagieuses d'origine infectieuse, causées par des orthomyxoviridae (un type de virus à ARN). Elles touchent les oiseaux et un certain nombre de mammifères - dont l'Homme et le chien.
Il existe un grand nombre de virus susceptibles de causer une grippe, qui sont classés dans des types différents : A, B, C et D. Chacun d'entre eux peut lui-même être découpé en sous-types : par exemple, la grippe aviaire est causée par le virus H5N1, qui appartient au sous-type H du type A. Les épidémies annuelles de grippe humaine sont quant à elles causées par des virus de type A ou B.
Pour ce qui est de la grippe du chien, elle peut être le fait de différents virus, notamment H3N8 et H3N2, qui sont eux aussi de type A et de sous-type H.
La grippe est connue chez le chien depuis seulement le tout début du 21ème siècle : c'est donc vraisemblablement une maladie très récente. À titre de comparaison, on estime qu'elle existe depuis environ 4500 ans chez l'humain, et depuis environ 6000 ans chez les oiseaux.
Les premiers cas de grippe du chien furent détectés aux États-Unis en 2004, lorsqu'une étrange maladie respiratoire toucha une vingtaine de lévriers d'un même cynodrome, dont huit finirent par vite décéder. Les analyses réalisées ensuite montrèrent que le responsable était une mutation de H3N8, un des virus responsables de la grippe du cheval. La maladie se répandit très vite dans le pays : rien qu'en 2005, plus de 20.000 cas y furent recensés. Elle y est encore courante de nos jours, mais demeure rare en revanche en Europe.
Pour ce qui est de H3N2, ses origines sont encore mystérieuses. Il pourrait provenir d'une mutation du virus de la grippe aviaire, qui serait survenue en Asie. C'est en tout cas ce que suggère l'étude intitulée « Avian-origin H3N2 canine influenza A viruses in Southern China » et publiée en 2010 dans la revue Infection, Genetics and Evolution : le virus de la grippe H3N2 ayant rendu malades des chiens du sud de la Chine entre 2006 et 2007 avait en effet des origines aviaires. Quoi qu'il en soit, il convient de souligner qu'il peut aussi se transmettre au chat, ce qui n'est a priori pas le cas de H3N8.
Enfin, une étude intitulée « Emergence and Evolution of Novel Reassortant Influenza A Viruses in Canines in Southern China » et publiée en 2018 dans l'ASM Journals a montré que le virus H1N1 de la grippe porcine s'est recombiné en Chine avec H3N2 pour créer plusieurs nouveaux virus de la grippe canine. L'un d'entre eux est une sorte de nouveau H1N1 qui serait cette fois adaptée à la gent canine, et pourrait même à terme finir par passer à l'Homme - d'autant qu'en Chine, où cette souche est présente, manger de la viande de chien est une pratique encore courante, qui augmente évidemment le risque de transmission inter-espèces.
En résumé, la grippe canine est à ce jour causée par plusieurs virus distincts : H3N8, H3N2, et plusieurs recombinaisons entre H1N1 et H3N2. Il est toutefois probable qu'il existe d'autres souches de virus de la même famille, mais que ces dernières n'aient pas encore été identifiées.
Quel que soit le virus exact qui est en cause, la grippe est une maladie très contagieuse, comme la plupart des autres infections respiratoires. Contrairement à ce que l'on observe chez l'humain, il n'y a pas vraiment de saison de la grippe chez le chien : loin d'être cantonnée à l'hiver, elle survient tout au long de l'année.
La contamination se fait essentiellement de manière directe, par le biais de gouttelettes excrétées lorsque le chien tousse, éternue ou même respire. Bien évidemment, les lieux fermés et mal ventilés tels que les refuges, les pensions canines, les élevages et les halls d'exposition canine sont propices à l'accumulation de virus dans l'air ambiant et donc à la transmission à d'autres chiens.
La contamination peut se faire aussi de manière indirecte, par le biais d'objets souillés par du virus. En effet, ce dernier est capable de survivre quelques heures à quelques jours hors de l'organisme. D'après certaines estimations, il survivrait environ 12 heures sur de la peau humaine, 24 heures sur des vêtements et des fibres textiles, et jusqu'à 48 heures sur des surfaces. Toutefois, il ne résiste pas aux désinfectants tels que l'eau de javel : un bon nettoyage permet donc de réduire fortement le risque de transmission.
Il faut d'ailleurs savoir qu'un chien porteur de la grippe peut être contagieux avant même d'avoir des symptômes : il risque alors de rendre malade son entourage.
La grippe qui touche les humains est causée par des virus différents de celle qui affecte les chiens. Par conséquent, même si on a contracté cette maladie, il n'y a pas à s'inquiéter quant à un éventuel risque de la transmettre à son chien : il n'existe pas.
L'inverse n'est pas possible non plus : aucun cas d'être humain ayant contracté la grippe canine n'a été recensé à ce jour. Un humain peut toutefois en être un vecteur, s'il est en contact avec un chien malade puis touche ensuite un chien sain ou certains de ses accessoires (jouet, gamelle, panier...) sans s'être lavé les mains entretemps. En revanche, le risque de transmission de la grippe aviaire d'un chien à un autre par l'intermédiaire des vêtements d'un humain est quant à lui considéré comme très faible, même s'il n'est pas totalement nul.
Cela dit, même si la transmission de l'Homme au chien ou du chien à l'Homme n'est pas possible à l'heure actuelle, rien ne garantit qu'il en restera toujours ainsi. En effet, les virus grippaux sont connus pour pouvoir facilement passer d'une espèce à l'autre. La prudence reste donc de mise : il n'est pas impossible qu'un jour, un chien puisse être contaminé par la grippe d'un humain - ou inversement.
Le délai d'incubation de la grippe du chien est assez variable en fonction de la souche concernée et de l'individu. Elle peut en effet être seulement d'un ou deux jours dans les cas les plus rapides, mais de plus d'une semaine dans les cas les plus lents.
En général et comme pour beaucoup d'autres maladies infectieuses, le délai d'incubation est fonction de la quantité de virus inhalée et de la gravité de la grippe : plus il est court, plus les symptômes ont des chances d'être sévères.
Quelle que soit la souche, un chien qui a la grippe a des symptômes proches de ceux que l'on observe en cas de grippe chez un humain.
Le principal est une inflammation de l'appareil respiratoire, notamment de la muqueuse nasale, de la trachée et/ou des bronches. Cette inflammation expose les cellules des muqueuses respiratoires et les rend vulnérables à une éventuelle surinfection bactérienne : lorsque cela se produit, la grippe passe d'une forme classique à une forme grave, et peut même conduire au décès. Il s'agit d'ailleurs du principal risque lié à cette maladie, aussi bien chez l'Homme que chez son meilleur ami.
Il convient toutefois de souligner qu'un chien peut être asymptomatique pour la grippe canine, comme cela se produit de manière similaire chez les humains. Il ne présente alors aucun symptôme, mais est pourtant bel et bien contagieux, et répand le virus tout autour de lui. Selon certaines estimations, cela se produirait dans environ 20% des cas, ce qui est loin d'être négligeable. Cela étant, le pourcentage d'asymptomatiques est encore plus élevé chez l'humain, puisqu'il est de l'ordre de 75%.
Les symptômes les plus communs de la forme classique de la grippe chez le chien sont globalement les mêmes que ceux d'un gros rhume : le nez qui coule, des éternuements, un larmoiement anormal, ainsi qu'une toux sèche ou grasse pendant deux à trois semaines. Dans certains cas, on observe aussi une perte d'appétit, des frissons ou un peu de fièvre.
Tant que la grippe se cantonne à sa forme classique, le risque de décès est faible, et la rémission survient généralement en quelques semaines. Le chien peut toutefois rester contagieux plus longtemps que cela, puisqu'en moyenne il l'est environ 4 semaines au total.
En cas de complication et quel que soit le virus exact qui en est à l'origine, la grippe du chien peut évoluer en pneumonie, et devenir beaucoup plus grave. De nouveaux symptômes sont alors susceptibles de faire leur apparition, tels qu'une présence de sang lors de la toux, une léthargie importante ainsi qu'une fièvre élevée.
À ce stade, le risque de décès est réel. Selon certaines estimations, près d'un chien sur deux pourrait alors décéder s'il n'est pas pris en charge.
Pas plus qu'il n'existe de traitement contre la grippe humaine, il n'est pas possible à ce jour de soigner la grippe du chien, quelle que soit la souche par laquelle elle est causée.
La seule chose qu'il est possible de faire est de soutenir l'animal malade en soulageant ses symptômes avec des médicaments (par exemple des antitussifs ou des antalgiques), le temps que son organisme combatte le virus et l'élimine. En cas de surinfection par des bactéries - notamment au niveau de l'appareil respiratoire - des antibiotiques pour chien peuvent être administrés pendant quelques jours pour éviter les complications.
En dehors de cela, il faut veiller à ce qu'il continue à manger et s'hydrater : c'est le meilleur moyen qu'il guérisse vite. Autant éviter de le sortir tant qu'il est malade : mieux vaut le garder bien au chaud et à l'abri.
Enfin, il est préférable d'éviter les contacts avec d'autres chiens (qu'il s'agisse de ceux du foyer ou du voisinage) pendant 4 semaines à partir de l'apparition des symptômes, pour éviter de les contaminer. Cela vaut aussi d'ailleurs pour les chats, car un des virus de la grippe canine peut les toucher eux aussi.
Chez le chien comme chez l'Homme, il est difficile de prévenir la grippe. En effet, le virus circule facilement dans l'air et peut aussi se transmettre par le biais de surfaces ou d'objets contaminés, y compris dans certains cas plusieurs jours après s'être invité dessus.
C'est pour cela que la mise en quarantaine des sujets touchés est fortement recommandée pour empêcher toute transmission. Cela dit, il existe un vaccin contre cette maladie, mais il n'offre pas une fiabilité totale.
Il existe un vaccin contre la grippe canine : il a été créé en 2009 aux États-Unis, au départ pour lutter contre la souche H3N8, avant d'être adapté en 2015 pour combattre H3N2. Aujourd'hui, il est possible de vacciner son chien soit contre H3N8, soit contre H3N2, soit contre les deux (via un vaccin capable à lui seul de protéger contre les deux souches).
Fabriqué à partir d'une forme inactivée du virus, le virus s'administre par le biais de deux injections devant être réalisées à quelques semaines d'intervalle. Un rappel est toutefois nécessaire chaque année pour que la protection perdure dans le temps.
Toutefois, à l'instar du vaccin contre la grippe humaine, son efficacité est limitée : il ne protège pas à 100% de la maladie, même s'il en réduit la durée et la gravité. Il n'est donc pas utilisé massivement, et est plutôt réservé aux individus les plus fragiles et/ou exposés (notamment ceux qui vivent en groupe). De plus, il est bien plus courant aux États-Unis et au Canada qu'en Europe, où la grippe canine est très rare.
Cela dit, un nouveau vaccin contre la grippe du chien est en cours de développement aux États-Unis, à partir de souches vivantes atténuées de virus : cela devrait lui conférer une meilleure efficacité. Il présente aussi l'avantage de s'administrer par voie nasale sous forme de spray, plutôt que par injection. Les résultats des premiers essais réalisés sur des souris ont été compilés dans l'étude intitulée « Temperature-Sensitive Live-Attenuated Canine Influenza Virus H3N8 Vaccine » et publiée en 2017 dans le Journal of Virology.
Dès lors qu'un chien a la grippe, la principale précaution à prendre est de le placer en quarantaine pendant quatre semaines : c'est le délai pendant lequel il reste contagieux, même s'il guérit plus vite que cela. Cela évite qu'il contamine les autres animaux autour de lui, aussi bien ceux du foyer que ceux qu'il pourrait rencontrer lors de ses promenades et sorties.
Il faut donc l'installer dans une pièce à laquelle les éventuels autres chiens et chats du foyer n'ont pas accès, et ses divers accessoires (panier, jouets, gamelle...) doivent être désinfectés et lavés. En parallèle, quand on découvre qu'il est malade, un nettoyage complet du domicile est recommandé, vêtements et tissus compris.
Par ailleurs, il ne faut pas perdre de vue que même s'il ne peut être lui-même touché par la grippe canine, un humain peut en être un vecteur et contaminer d'autres animaux. Par conséquent, il est important de se laver soigneusement les mains si l'on touche le chien malade ou certains de ses accessoires, pour ne pas risquer de répandre du virus dans le foyer.
Chez le chien, la grippe est causée par des virus différents de ceux qui sont à l'origine de cette maladie chez l'Homme, mais son évolution et ses symptômes sont globalement les mêmes.
En général, l'animal finit par guérir au bout de 2 à 3 semaines, même s'il reste contagieux plus longtemps. Il peut toutefois arriver qu'elle évolue vers une forme grave, mais cela reste rare. La grande difficulté de cette maladie est surtout d'éviter la contamination des éventuels autres animaux du foyer, car le virus se transmet facilement. En général, la mise en place d'une quarantaine stricte s'impose.