La réglementation sur les chiens dangereux et interdits en Suisse

Un chien montrant les crocs

Certaines races de chiens ont une mauvaise image qui leur colle à la peau, entretenue souvent par toutes sortes de faits divers et histoires tragiques. Un peu partout, le législateur est donc soumis à une forte pression pour réduire – voire éliminer totalement – le risque que de tels chiens représentent aux yeux de l’opinion publique.

On trouve ainsi dans de nombreux pays – en particulier les plus développés économiquement - des réglementations imposant diverses restrictions pour l’importation, l’acquisition et la reproduction de certains chiens, ainsi que la vie quotidienne avec eux : interdiction d’accès à certains lieux, muselière obligatoire... Elles peuvent avoir une échelle nationale (c’est le cas par exemple de la loi française sur les chiens dangereux) ou locale.

La Suisse relève de ce deuxième cas : il n’existe pas de loi fédérale sur le sujet, mais les cantons ont toute latitude pour légiférer dessus. Une moitié d’entre eux ont effectivement décidé de le faire.

Les races dangereuses

Un chien agressif posant ses pattes avant sur un grillage

Lorsqu’il est question de « chien dangereux », certaines races sont souvent citées comme exemples, surtout à cause de leur apparence et de leur histoire.

C’est le cas notamment du Pitbull – et plus généralement des races de type bull, à cause de leur passé de chien de combat.

Il en va de même des molosses - et tout particulièrement du Rottweiler, connu pour son gabarit imposant et son tempérament très protecteur. Ayant pour la plupart un physique musclé et impressionnant, eux aussi ont un passé qui joue en leur défaveur. Ils étaient utilisés à la guerre par les Romains, et certaines légendes vont même jusqu’à affirmer qu’ils descendent des tigres. Élevés dans l’optique d’être puissants et protecteurs, ils firent pendant des siècles des chiens de chasse et de garde très appréciés. En revanche, ils sont aujourd’hui vus comme trop agressifs pour nos sociétés contemporaines. Il n’est d’ailleurs pas rare d’entendre arguer qu’ils constituent un danger du fait qu’ils mordent plus et plus violemment que d’autres types de races, statistiques à l’appui.

Il existe donc dans de nombreux pays et collectivités territoriales des lois plus ou moins contraignantes ciblant certains chiens en particulier, considérés comme dangereux. Ces derniers sont principalement des molosses, mais d’autres types sont également parfois concernés – par exemple certaines races de chiens de berger.

L’apparition et l’évolution des réglementations sur les chiens dangereux en Suisse

Un chien sautant dans la neige en forêt

Les réglementations relatives aux chiens dangereux sont relativement récentes en Suisse, puisque les premières lois cantonales sur le sujet furent adoptées dans les années 2000. Par exemple, la Loi sur les conditions d’élevage, d’éducation et de détention des chiens du canton de Genève (LChiens/GE) date de 2003. C’est cette même année que le canton de Bâle-Campagne vota l’Ordonnance sur la détention de chiens potentiellement dangereux (Hundenverordnung/BL). D’autres en revanche attendirent la fin des années 2000 pour légiférer, à l’image par exemple de Zurich : la Hundengesetz/ZU y fut adoptée en 2008.

Instaurer des lois n’empêche pas de les faire évoluer par la suite, et c’est souvent ce qui s’est passé – en l’occurrence, plutôt pour les étoffer et les durcir. Par exemple, la Loi sur les conditions d’élevage, d’éducation et de détention des chiens genevoise (LChiens/GE) ne comportait lors de son adoption en 2003 que quatre articles relatifs aux chiens dangereux. Après sa révision en 2018, on y trouvait un chapitre entier sur le sujet, regroupant pas moins de onze articles. Par exemple, les chiens appartenant à des races dites d’attaque sont depuis 2008 interdits sur le territoire du canton, sauf dérogation exceptionnelle (article 23) : en 2003, ils restaient admis dès lors qu’ils avaient été acquis auprès d’un élevage affilié à un club cynologique suisse ou auprès d’un organisme de protection des animaux suisse (ancien article 15).

Comment expliquer l’apparition et le renforcement des lois sur les chiens dangereux en Suisse ?

Des Berger Blanc Suisse posant sous la neige dans une forêt

L’apparition puis le durcissement des législations visant les chiens supposés dangereux peut notamment s’expliquer par deux principaux facteurs.

Tout d’abord, dans les années 2000, la forte médiatisation de plusieurs attaques de chiens choqua l’opinion publique, et incita le législateur à s’emparer du sujet en élaborant des lois entendant protéger les citoyens contre certains types de chiens présentés comme particulièrement dangereux. Celle qui eut le plus grand écho médiatique se déroula en 2005, lorsque dans le canton de Zurich un petit garçon de 6 ans succomba à ses blessures après avoir été mordu à plusieurs reprises par trois Pitbulls.

À cet écho médiatique vinrent s’ajouter toutes sortes de statistiques et d’écrits défavorables à certaines races.
Ce fut le cas par exemple d’une étude soutenue par l’Office vétérinaire fédéral suisse (OVF), intitulée « Medizinisch versorgte Hundebissverletzungen in der Schweiz: Opfer, Hunde, Unfallsituationen » et publiée en 2002 en tant que thèse de doctorat. Menée pendant un an auprès des services de santé de tout le pays, elle visait à mieux connaître les profils des victimes et auteurs de morsures. Il en ressort que les chiens de berger ainsi que les Rottweilers mordent proportionnellement plus que les autres, quand on ramène le nombre de cas à leur poids au sein de la population canine suisse.

En 2009, l’Association Suisse des Vétérinaires Cantonaux (ASVC) publia son rapport annuel sur les accidents par morsure lors de l’année précédente. Parmi les 2473 morsures rapportées sur des humains, 78 avaient été infligées par des Rottweilers, 11 par des Pitbulls et 4 par des Staffordshire Bull Terrier, soit respectivement 3,2%, 0,4% et 0,2% du total. Or, selon le même rapport, ces races ne représentaient alors que 0,9%, 0,2% et 0,03% de la population canine du pays : elles étaient donc largement sur-représentées parmi les chiens ayant mordu.

En 2010, selon les chiffres de l’OVF (Office Vétérinaire Fédéral), sur 2567 morsures rapportées, 184 furent attribuées à des molossoïdes, soit 7,2%. Si cette part de morsures n’est pas disproportionnée par rapport au nombre de chiens de ce type sur le territoire pendant cette période (ils représentaient alors environ 7% de la population canine en Suisse, selon les statistiques de la base de données Amicus), ces chiffres furent tout de même jugés alarmants.

Tant ce genre de travaux et publications que différents faits divers très médiatisés amenèrent plusieurs cantons à élaborer des lois sur les chiens ou, s’ils en avaient déjà, y rajouter des normes relatives à la détention de certaines races.

Le principe des lois sur les chiens dangereux en Suisse

Des règles fixées au niveau cantonal, et non fédéral

Village suisse au pied des montagnes et au bord d'un lac

La Suisse ne dispose pas de loi fédérale qui définit la dangerosité d’un chien (ou d’ailleurs d’un quelconque autre animal) et/ou désigne quelles races sont considérées comme dangereuses. Il existe certes quelques lois réglementant certains aspects de la détention d'une poignée animaux, dont les chiens (par exemple la Loi sur la Protection des Animaux ainsi que l’Ordonnance sur la Protection des Animaux), mais ce sont les cantons qui ont la compétence d’adopter – ou non – des normes définissant la dangerosité d’une race et listant les chiens dont la possession est interdite ou restreinte sur leur territoire.

La moitié d’entre eux l’ont fait, puisque 13 cantons sur 26 possèdent effectivement une réglementation sur les chiens dangereux. Dans les 13 autres, il n’existe aucune loi ciblant tel ou tel type de chiens en particulier. Géographiquement parlant, ce sont surtout les cantons situés sur le Plateau suisse, où se trouvent les plus grandes villes du pays (Zurich, Genève, Bâle et Lausanne), qui ont édicté de telles lois.

Le rôle des communes

Photo aérienne de la ville de Fribourg, en Suisse

Les communes suisses sont généralement habilitées à édicter des règles relatives aux chiens touchant à des aspects qui ne sont pas déjà couverts par l’éventuelle réglementation cantonale sur le sujet. Cela suppose toutefois qu’il existe une délégation législative, c’est-à-dire que la loi cantonale donne expressément le droit à ses communes de régler ces aspects. Par ailleurs, les règlements communaux doivent évidemment ne pas être en contradiction avec celle-ci : par exemple, si elle impose le port de la muselière dans l’espace public, une commune ne saurait étendre aussi cette obligation aux espaces privés.  

Il existe ainsi dans certaines communes des réglementations quant aux zones où les animaux de compagnie doivent être tenus en laisse ou aux endroits où ils ne sont pas les bienvenus. Le canton de Fribourg, par exemple, donne explicitement le droit aux communes de mettre en place ces restrictions à l’article 30 de sa Loi sur la détention des chiens (LDCh/FR).

Toutefois, les éventuelles normes fixées par les communes ne peuvent s’appliquer qu’à tous les chiens sans distinction de race ou de type, qu’ils fassent ou non l’objet de réglementations spécifiques au niveau de la loi cantonale. C’est uniquement cette dernière qui a le pouvoir d’interdire certaines races ou de soumettre leur détention à autorisation, et cela trouve alors à s’appliquer sur l’ensemble des communes du territoire.

Cependant, lorsque le canton impose une procédure d’autorisation de détention pour certains chiens, il peut se réserver la possibilité de demander l’avis de la commune où réside le demandeur. C’est ce que prévoit par exemple l’article 9 alinéa 2bis du Règlement sur la détention des chiens du canton de Fribourg (RDCh/FR). En effet, comme la commune est au plus près du citoyen et de son animal, elle détient parfois des informations à leur sujet que le canton ignore. Il faut toutefois noter que ce dernier n’est pas lié par l’avis de la commune, et peut tout à fait délivrer l’autorisation malgré un avis négatif de celle-ci.

Le nombre de races visées par les lois cantonales

Les lois cantonales relatives aux chiens considérés comme dangereux ne concernent pas le même nombre de races d’un canton à l’autres, puisque chacun a toute latitude pour établir sa liste à sa guise. Le canton de Vaud se distingue en ciblant seulement trois races, tandis qu’à l’inverse le Tessin en désigne pas moins de trente. En dehors de ces deux exceptions, le nombre de races concernées se situe entre huit et quinze.

Les types de chiens les plus ciblés par les lois cantonales

Un American Staffordshire Terrier aboyant agressivement

D’une manière générale, les races les plus indésirables en Suisse sont l’American Staffordshire Terrier, le Pitbull et le Rottweiler. On retrouve les deux premières dans l’ensemble des 13 réglementations cantonales relatives aux chiens considérés comme dangereux. Concernant le Rottweiler, le canton de Zurich est le seul où il ne fait pas partie de la liste.

Le Bull Terrier et le Staffordshire Bull Terrier sont également souvent ciblés : ils figurent chacun sur la liste dans pas moins de 11 cantons.

Le Doberman, le Dogo Argentino, le Fila Brasileiro et le Mastiff figurent quant à eux sur au moins la moitié des listes.

Par ailleurs, il est important de noter que quel que soit le canton, les chiens issus de croisements avec les races ciblées sont également concernés par les dispositions relatives à ces dernières.

En tout cas, ces réglementations ont un impact réel sur la population des races en question. Par exemple, il n’y avait en 2015 plus que 137 molosses enregistrés dans le canton de Genève, alors qu’ils étaient 583 (soit environ quatre fois plus nombreux) en 2008. Toujours en 2015, le nombre de « chiens de combat » enregistrés dans le canton de Zurich s’élevait à 259, contre 350 en 2010.  

Cet impact se ressent également au niveau national. En 2021, l’American Staffordshire Terrier et le Rottweiler ne représentaient respectivement que 7 et 39 enregistrements sur les 8249 chiens supplémentaires inscrits cette année-là au Livre des Origines Suisse (LOS) - soit 0,08% du total pour le premier, et 0,4% pour le second. Les statistiques de la base de données Amicus faisaient état quant à elle de la présence de 2867 American Staffordshire Terriers et 1664 Rottweilers sur le territoire suisse en 2022, pour un total de 557.303 chiens. Cela représente là aussi un pourcentage très faible : respectivement 0,5% et 0,3%.

Si l’on compare par exemple avec l’Italie, où il n’existe pas de loi ciblant certaines races, le contraste est flagrant : en 2021, l’American Staffordshire Terrier et le Rottweiler représentaient respectivement 1,7% et 1,9% des enregistrements de chiens de race auprès de l’Ente Nazionale Cinofilia Italiana (3520 et 3883 individus, sur un peu plus de 200.000 inscriptions cette année-là).

Les types de dispositions les plus fréquents

Les types de chiens considérés comme dangereux peuvent être répartis en deux catégories : certains dont la détention est soumise à autorisation, et d’autres qui sont tout simplement interdits. Toutefois, le canton de Fribourg est le seul à procéder de la sorte, c’est-à-dire à cumuler deux dispositifs : les chiens de type Pitbull y sont interdits (article 20 de la Loi sur la détention des chiens, LDCh/FR), mais d’autres races en revanche (telles que le Rottweiler et le Dobermann) y voient seulement leur possession soumise à autorisation (article 8 du Règlement sur la détention des chiens, RDCh/FR).  

Les autres cantons ne font pas une telle distinction entre deux catégories de chiens supposés dangereux, mais à des degrés différents. Certains se contentent de conditionner la possession de certaines races à une autorisation : c’est le cas par exemple du Tessin. D'autres font le choix d’interdire purement et simplement certains chiens, tandis qu’aucune restriction ne s’applique aux autres : c’est l’approche retenue notamment par le canton de Genève.

L’interdiction de détention

Un Bullmastiff courant dans l'herbe, le long d'un chemin

Quatre cantons font le choix de prohiber certaines races de leur territoire : Fribourg, Genève, le Valais et Zurich. Celles-ci ne peuvent ni y être ni importées, ni cédées ou acquises (moyennant finance ou gratuitement), ni élevées, ni détenues. Ce ne sont pas exactement les mêmes dans les quatre cantons concernés, certains étant plus stricts que d’autres et ayant donc une liste plus exhaustive.

La désignation des races interdites se fait en général en deux étapes. Dans un premier temps, l’organe législatif cantonal édicte une norme qui définit de manière assez large ce qui constitue une race dangereuse ; dans un second temps, l’organe exécutif établit la liste précise de celles-ci. Ainsi, les organes exécutifs des cantons peuvent adopter des listes différentes en fonction de leur vision des choses et de la situation locale.

 

Dans le canton de Fribourg, seul le Pitbull et ses croisements sont concernés, au titre de l’article 20 de la Loi sur la détention des chiens (LDCh/FR).


Dans le canton de Genève, l’article 23 de la Loi sur les chiens (LChiens/GE) dispose que « les chiens appartenant à des races dites d’attaque ou jugées dangereuses, dont le Conseil d’État dresse la liste par voie réglementaire après consultation de la commission, ainsi que les croisements issus de l’une de ces races, sont interdits sur le territoire du canton ». Le Conseil d’État genevois a ensuite établi une liste de quinze races visées, via l’article 17 du Règlement d'application de la loi sur les chiens (RChiens/GE) : l’American Staffordshire Terrier, le Boerboel, le Bullmastiff, le Cane Corso, le Dogo Canario, le Dogue Argentin, le Dogue de Bordeaux, le Fila Brasileiro, le Mastiff, le Mâtin Espagnol, le Mâtin Napolitain, le Pitbull, le Rottweiler, le Thaï Ridgeback et le Tosa Inu.

 

En Valais, la liste comprend douze races : l’American Staffordshire Terrier, le Bull Terrier, le Doberman, le Dogue Argentin, le Fila Brasileiro, le Mastiff, le Mâtin Espagnol, le Mâtin Napolitain, le Pitbull, le Rottweiler, le Staffordshire Bull Terrier et le Tosa Inu.

 

Enfin, dans le canton de Zurich, treize races ne sont pas les bienvenues, en vertu de l’article 5 du Hundeverordnung (HuV/ZU) : l’American Bull Terrier, l’American Bully, l’American Bully XXL, l’American Pocket Bully, l’American Staffordshire Terrier, le Bandog, le Basicdog, le Bull Terrier, le Pitbull, le Staffordshire Bull Terrier, le Swiss Blue Bully et le Swiss Champagner Bully.

Dans certains cas, il est néanmoins possible d’obtenir une dérogation. L’article 23 de la Loi sur les chiens du canton de Genève (LChiens/GE) prévoit cette possibilité si le chien et son maître remplissent neuf conditions cumulatives, dont la réussite d'un test de maîtrise et comportement ainsi qu’une castration ou stérilisation de l’animal. Si une dérogation est accordée, le propriétaire ne peut sortir son chien qu’en laisse et muselière, et doit notamment passer un test de maîtrise et comportement avec son animal chaque année (article 24 de la loi).

L’autorisation de détention

Un Berger Allemand courant dans une prairie

Une autre mesure moins drastique que l’interdiction pure et simple est de soumettre la possession de certaines races à autorisation. Une autorisation est alors nécessaire pour importer, céder ou acquérir (moyennant finance ou gratuitement), élever et détenir un chien appartenant à l’une d’entre elles.

Dix cantons ont adopté une telle solution, et la liste est établie selon le même procédé que pour les chiens interdits : un cadre législatif assez large est mis en place, puis il revient au pouvoir exécutif cantonal de choisir les races auxquelles l’appliquer. Celles-ci diffèrent donc selon les cantons, mais sont en général autour d’une dizaine.

Le canton doté de la liste la plus conséquente est le Tessin, où le Regolamento sui cani cible pas moins de 31 races, dont certaines qui ne le sont nulle part ailleurs dans le pays. On y trouve l’American Staffordshire Terrier, le Beauceron, le Berger Allemand, le Berger d’Anatolie, le Berger d’Asie Centrale, le Berger Belge (Tervueren, Malinois, Laekenois, Groenendael), le Berger du Caucase, le Berger Hollandais, le Berger Polonais de Podhale, le Berger de Russie Méridionale, le Berger Yougoslave, le Bouledogue Américain, le Bullmastiff, le Bull Terrier, le Bull Terrier Miniature, le Cane Corso, le Chien Loup Tchécoslovaque, le Dobermann, le Dogue Allemand, le Dogue Argentin, le Dogue de Bordeaux, le Dogue du Tibet, le Fila Brasileiro, le Komondor, le Kuvasz, le Mastiff, le Mâtin Napolitain, le Pitbull, le Rottweiler, le Staffordshire Bull Terrier et le Tosa Inu.

À l’inverse, le canton doté de la liste la plus petite est celui de Vaud. En effet, le Règlement d’Application de la Loi sur la Police des Chiens (RLPolC/VD) y restreint la possession de trois races seulement : l’American Staffordshire Terrier, le Pitbull et le Rottweiler.

Quand on souhaite faire l’acquisition d’un chien dont la possession est soumise à autorisation dans le canton où l’on réside, ou bien qu’on prévoit d’emménager dans un canton où le chien que l’on possède déjà est soumis à une telle réglementation, il faut demander au service cantonal compétent l’autorisation requise, et ce avant l’adoption ou le déménagement. Celui-ci examine alors la demande et prend une décision sur la base de divers critères, qui diffèrent d’un canton à l’autre.

Par exemple, l’article 19 de la Loi sur la détention des chiens (LDCh/FR) et les articles 8 à 16 du Règlement sur la détention des chiens (RDCh/FR) du canton de Fribourg prévoient que le maître doit être âgé de plus de 18 ans, avoir les connaissances nécessaires concernant la détention des chiens ainsi que la manière de les traiter, et jouir d’une bonne réputation. Cette dernière est évaluée simplement à partir de l’examen de son casier judiciaire. Quant à ses connaissances, il s’agit de réussir une évaluation de conductibilité avec son animal, réalisée selon les directives du service qui a la compétence de délivrer l’autorisation. Cette dernière doit être renouvelée tous les deux ans, mais peut être retirée dès lors les conditions de son octroi ne sont plus remplies.

Le principe est globalement le même dans les autres cantons, même si les modalités exactes divergent – y compris potentiellement en ce qui concerne la durée pour laquelle l’autorisation est accordée.  

En outre, dans certains (dont d’ailleurs celui de Fribourg), la loi prévoit la possibilité pour le service cantonal en charge de demander un avis à la commune où réside le requérant. Le cas échéant, celui-ci est purement consultatif : le canton reste le seul décisionnaire quant à la délivrance ou non du permis.

Par ailleurs, le fait de soumettre à autorisation la possession de certaines races n’empêche pas d’en interdire purement et simplement d’autres, considérées comme plus dangereuses encore. Le canton de Fribourg est toutefois le seul à cumuler les deux types de dispositifs.

Le port obligatoire de la muselière

Un Berger Allemand portant une muselière

Dans certains cantons, les chiens dont la détention est restreinte doivent porter une muselière – au moins dans certaines situations. Par exemple, l’article 17 de la Loi sur la police des chiens du canton de Vaud (LPolC/VD) l’impose lors de manifestations publiques.  

Le port de la muselière peut également être imposé à tout chien ayant montré un comportement dangereux, peu importe sa race. Une telle mesure est en vigueur notamment dans le canton de Fribourg (article 27 de la Loi sur la détention des chiens - LDCh/FR), dans celui de Genève (article 39 de la Loi sur les chiens - LChiens/GE) et dans celui de Vaud (article 26 de la Loi sur la police des chiens - LPolC/VD).

Par ailleurs, il arrive que des chiens appartenant à des races dont l’acquisition et la possession sont interdites dans un canton donné se trouvent malgré tout sur le territoire de ce dernier. C’est le cas en particulier de ceux qui y sont de passage, mais aussi de ceux qui y étaient présents avant l’entrée en vigueur de l’interdiction. Quel que soit le canton, ce cas de figure est prévu par la loi : les sujets en question doivent simplement porter une muselière dès qu’ils sont en dehors du domicile.

Les sanctions en cas de non-respect des lois

Quand on habite ou on se rend dans un canton possédant une loi relative aux chiens considérés comme dangereux, il est important de bien connaître celle-ci. En effet, sa violation peut être problématique non seulement pour soi-même, mais aussi pour l’animal.

 

Un Pitbull Américain enfermé dans une cage en acier

L’autorisation de détention

Un Rottweiler assis sur une plage et donnant la patte à sa maîtresse

En cas de détention d’un chien sans avoir obtenu l’autorisation requise du fait de la race à laquelle il appartient, la sanction prend généralement la forme d'une amende. Celle-ci peut s’avérer assez dissuasive : par exemple, au Tessin, elle est théoriquement susceptible d’aller jusqu’à 20.000 francs.

La loi peut aussi autoriser l’office vétérinaire cantonal à prendre différentes mesures, allant du simple examen vétérinaire de l’animal à son euthanasie.

Le port obligatoire de la muselière

Un chien Pitbull marron portant une muselière en métal

En cas de violation de l’obligation du port de la muselière, que ce soit intentionnellement ou par négligence, le contrevenant s'expose à une amende.

 

Le montant de celle-ci varie selon les cantons et la gravité de la violation, mais peut être particulièrement dissuasif. C’est le cas par exemple en Valais, où l’article 53 de la Loi d’application de la loi fédérale sur la protection des animaux du canton du Valais (LALPA/VS) prévoit qu’il est susceptible d’aller jusqu’à 20.000 francs.

Les races dangereuses et les chiens dangereux

Un Berger Allemand en train d'aboyer et ayant un air agressif

En complément ou à la place d’une réglementation visant certaines races considérées comme dangereuses, les cantons peuvent prévoir des dispositions à l’encontre de chiens en particulier considérés comme dangereux, quelle que soit leur race. C‘est par exemple ce qu’on trouve dans l’article 26 de la Loi sur les chiens du canton de Genève (LChiens/GE) et dans l’article 25 de la Loi sur la détention des chiens du canton de Friboug (LDCh/FR).

Il s’agit de chiens qui ont déjà par le passé attaqué ou blessé un humain ou un autre animal, ou qui montrent un comportement plus agressif que la norme. Ces spécimens sont alors fichés, et les autorités cantonales peuvent prendre plusieurs mesures à leur encontre, allant jusqu’à leur euthanasie.

Certains cantons font le choix de cumuler une réglementation relative aux races considérées comme dangereuses et une autre concernant les chiens dangereux, tandis que d’autres font le choix de n’avoir que la seconde. Cette dernière solution est celle retenue par exemple par le canton de Neuchâtel, avec sa Loi sur les chiens (LChiens/NE). Par conséquent, aucune race n’y fait l’objet de dispositions spécifiques.

Les lois sur les chiens dangereux dans différents cantons

Treize cantons suisses disposent d’une loi régissant la possession de certaines races de chiens. Parmi ceux-ci, on trouve quatre cantons romands : Fribourg, Genève, le Valais et Vaud.

La loi sur les chiens dangereux du canton de Fribourg

Un Pitbull marchant sur de l'herbe sèche

Adoptée en 2006, la Loi sur la détention des chiens du canton de Fribourg (LDCh/FR) interdit à travers son article 20 une seule et unique race sur le territoire : le Pitbull. Cette interdiction vaut également pour tout chien dont l’un des parents au moins est un Pitbull.

Fribourg est le seul canton où une seule race fait l’objet d’une interdiction : partout ailleurs où une réglementation similaire existe, plusieurs d’entre elles sont ciblées.

La loi fribourgeoise vise toutefois d’autres races, mais celles-ci ne sont pas interdites : simplement, leur détention nécessite d’obtenir une autorisation. Quatorze d’entre elles sont ciblées de la sorte : l’American Staffordshire Terrier, le Boerbull, le Bull Terrier (à l’exception du Mini Bull Terrier), le Cane Corso, le Doberman, le Dogo Argentino, le Dogo Canario, le Fila Brasileiro, le Mastiff, le Mâtin Espagnol, le Mâtin Napolitain, le Rottweiler, le Staffordshire Bull Terrier et le Tosa Inu. Les sujets dont l’un au moins des parents est issu des races en question sont également concernés. La procédure de demande d’autorisation est détaillée aux articles 8 à 16 du Règlement sur la détention des chiens (RDCh/FR).  

Les articles 19 et 20 de la Loi sur la détention des chiens (LDCh/FR) prévoient toutefois une exception pour les personnes de passage, dès lors que certaines conditions sont remplies. En effet, il est permis d’introduire dans le canton (sans avoir besoin de l’enregistrer ou même de signaler sa présence) un chien interdit ou dont la possession est soumise à autorisation dès lors que le séjour ne dure pas plus de 90 jours, qu’il est tenu en laisse et qu’il porte une muselière. Au besoin ou en cas de doute, on peut demander avant de venir des éclaircissements au Service de la sécurité alimentaire et des affaires vétérinaires. En tout état de cause, il faut bien sûr se conformer aux éventuels règlements communaux des municipalités traversées, qui trouvent à s’appliquer à tous les chiens quelle que soit leur race.

Par ailleurs, dans ses articles 24 et suivants, la Loi sur la détention des chiens (LDCh/FR) prévoit différentes dispositions à l’encontre des chiens dangereux car ayant blessé une personne, grièvement blessé un animal et/ou se comportant de manière particulièrement agressive, peu importe leur race. Suite à l’incident, ils sont fichés par les autorités cantonales et soumis à un examen au terme duquel des mesures sont susceptibles d’être décidées. Celles-ci peuvent aller jusqu’à la stérilisation voire l’euthanasie.

La loi sur les chiens dangereux du canton de Genève

Un Cane Corso en train de courir sur l'herbe

La législation du canton de Genève ne prévoit pas de dispositif d’autorisation pour posséder un chien de telle ou telle race. 

En revanche, certaines sont prohibées. Faisant référence à l’article 23 de la Loi sur les chiens (LChiens/GE) adoptée en 2011 et qui elle-même succédait à la Loi sur les conditions d'élevage, d'éducation et de détention des chiens de 2003, l’article 17 du Règlement d'application de la loi sur les chiens (RChiens/GE), entré en vigueur dès 2011, interdit ainsi de posséder un American Staffordshire Terrier, un Boerboel, un Bullmastiff, un Cane Corso, un Dogo Canario, un Dogue Argentin, un Dogue de Bordeaux, un Fila Brasileiro, un Mastiff, un Mâtin Espagnol, un Mâtin Napolitain, un Pitbull, un Rottweiler, un Thaï Ridgeback ou encore un Tosa Inu. Les spécimens dont au moins l’un des parents appartient à une de ces races sont également concernés.

L’article 23 de la loi prévoit toutefois qu’elle ne s’applique pas aux chiens déjà présents sur le territoire au moment de son adoption. Leurs propriétaires doivent néanmoins faire une demande d’autorisation de détention, et cette dernière est accordée dès lors que différentes conditions sont remplies. La même règle s’applique pour les races qui viendraient à être ajoutées à la liste par la suite.

L’article 23 prévoit également un dispositif de dérogation exceptionnelle pour une personne qui emménage dans le canton de Genève en provenance d’un autre canton ou d’un autre pays, et possède un chien qui y est normalement interdit. Dès lors que neuf conditions cumulatives sont vérifiées, il est possible de demander – et d’obtenir - une autorisation de détention.

L’article 24 de la loi dispose qu’un chien normalement interdit mais bénéficiant d’une autorisation de détention doit être muselé dès qu’il sort de son domicile. Il doit aussi être stérilisé ou castré, sauf contre-indication médicale avérée. Enfin, son propriétaire doit passer (et réussir) un test de maîtrise et de comportement chaque année, jusqu’à ce qu’il ait 8 ans révolus.

Enfin, l’article 12 du Règlement d'application de la loi sur les chiens (RChiens/GE) prévoit une exception supplémentaire : un chien normalement interdit sur le territoire cantonal est toléré (sans même qu’il soit nécessaire de l’enregistrer ou de signaler sa venue d’une quelconque manière) dès lors que la durée de son séjour en compagnie de son propriétaire n’excède pas 90 jours, et sous réserve de respecter l’obligation du port de la muselière qui s’applique à ces chiens dès lors qu’ils bénéficient d’une dérogation. L’article 12 énumère les règles qui en revanche ne trouvent pas à s’appliquer dans ce cas exceptionnel. En cas de doute, on peut s’adresser aux services cantonaux en amont, afin de s’assurer de respecter la réglementation et ainsi d'éviter toute mauvaise surprise. En tout état de cause, si l’on bénéficie de ce dispositif d’exception, il convient naturellement de respecter les règles cantonales qui s’appliquent à tous les chiens quelle que soit leur race (notamment le port de la laisse dans l’espace public) ainsi que les éventuelles réglementations communales (par exemple relatives aux lieux interdits aux chiens).

Dans ses articles 26 ainsi que 36 à 39, la Loi sur les chiens (LChiens/GE) définit également la façon dont est géré un spécimen dont le comportement est excessivement agressif, ou bien qui a attaqué ou gravement blessé un être humain ou un autre animal. Il fait alors l’objet d’un examen mené par le Département chargé du service de la consommation et des affaires vétérinaires genevois. Si celui-ci conclut qu’il est dangereux, différentes mesures peuvent être imposées à son propriétaire, allant de l’obligation de suivre des cours d’éducation canine à l’euthanasie de l’animal.

La loi sur les chiens dangereux du Valais

Photo aérienne du canton du Valais

En se basant sur l’article 37 de la Loi d’application de la loi fédérale sur la protection des animaux du canton du Valais (LALPA/VS), adoptée en 2014, le gouvernement valaisan interdit la possession de pas moins de treize races : l’American Bully, l’American Staffordshire Terrier, le Bull Terrier, le Doberman, le Dogue Argentin, le Fila Brasileiro, le Mastiff, le Mâtin Espagnol, le Mâtin Napolitain, le Pitbull, le Rottweiler, le Staffordshire Bull Terrier et le Tosa Inu. En outre, les chiens dont au moins l’un des parents est interdit le sont eux aussi.

Une exception est prévue pour le cas d’une personne qui est seulement de passage et possède un tel chien : elle est autorisée à le faire entrer sur le territoire du canton, sans même d’ailleurs avoir besoin de l’enregistrer auprès des autorités ou de le signaler d’une quelconque manière. Toutefois, la durée cumulée de séjour sur l’ensemble de l’année ne doit pas dépasser trente jours. Par ailleurs, l’animal doit porter une muselière ou une applique dentaire empêchant les morsures. En cas de doute concernant ce dispositif dérogatoire, on peut contacter directement le Service de la consommation et affaires vétérinaires valaisan avant de venir. En tout cas, même si on en bénéficie, il convient bien sûr de respecter les règles communales applicables à tout chien quelle que soit sa race.

Le Valais possède donc d’une réglementation assez stricte concernant ces 13 races qui sont interdites sur son territoire, mais en revanche il n’existe aucune disposition soumettant la détention de certaines autres races à une autorisation.

Il y en a en revanche concernant un chien qui a blessé un animal ou un humain, qui a un comportement plus agressif que la norme ou dont le propriétaire n’assure pas une détention sûre et responsable – peu importe sa race. En effet, les articles 38 et 39 de la Loi d'application de la loi fédérale sur la protection des animaux (LALPA/VS) prévoient que sa dangerosité fait alors objet d’une évaluation, et que différentes mesures peuvent être prises à son encontre en fonction des résultats de cette dernière. Elles vont de l’obligation pour le maître de suivre des cours d’éducation canine à l’euthanasie de l’animal.

La loi sur les chiens dangereux du canton de Vaud

Une rue de Montreux, dans le canton de Vaud (Suisse)

Contrairement à ce qui se fait notamment dans les cantons de Fribourg, de Genève et du Valais, aucune race n’est interdite dans le canton de Vaud.

En revanche, s’appuyant sur la Loi sur la police des chiens du canton de Vaud (LPolC/VD) adoptée en 2006, l’article 2 du Règlement d'application de la loi sur la police des chiens (RLPolC/VD), entré en vigueur en 2007, désigne comme « potentiellement dangereux » les chiens appartenant à trois races, ainsi que ceux dont l’un au moins des parents appartient à l’une d’elles : l’American Staffordshire Terrier, le Pitbull et le Rottweiler. Détenir un tel chien nécessite donc d’obtenir une autorisation de détention, et cela vaut aussi pour un spécimen dont au moins un parent appartient à l’une de ces races. Les conditions d’obtention sont au nombre de dix, listées à l’article 9 du Règlement d’application de la Loi sur la police des chiens (RLPolC/VD). En outre, l’article 17 de la la Loi sur la police des chiens du canton de Vaud (LPolC/VD) stipule que les chiens ainsi catégorisés doivent porter une muselière lors de manifestations publiques.

Comme ailleurs, une exception est prévue pour le cas d’une personne qui est seulement de passage avec son animal. En effet, dans le cas d’un séjour ne dépassant pas trois mois, il n’est pas nécessaire de disposer d’une autorisation – et l’obligation d’enregistrer son chien (peu importe sa race) ne s’applique d’ailleurs pas non plus. Au besoin ou pour s’assurer d’éviter toute mauvaise surprise, on peut prendre contact en amont avec la Direction générale de l’agriculture, de la viticulture et des affaires vétérinaires. Bien sûr, il n’en reste pas moins nécessaire de respecter les autres règles cantonales et communales qui valent pour tous les animaux, comme l’obligation de tenir son chien en laisse. 

En parallèle, peu importe sa race, tout individu qui a déjà par le passé mordu ou montré un comportement agressif est désigné par l’article 3 de la Loi sur la police des chiens (LPolC/VD) comme « chien dangereux », et certaines mesures trouvent alors à s’appliquer. Par exemple, son propriétaire ne peut détenir un second chien (quelle que soit la race de celui-ci) qu’avec une autorisation cantonale, selon le même principe et les mêmes critères que pour un chien considéré comme potentiellement dangereux.

Les cantons suisses n’ayant pas de règlementation sur les races dangereuses

Vue aérienne d'une ville du canton d'Appenzell Rhodes-Intérieures

Treize cantons suisses font le choix de ne pas avoir de réglementation ciblant certaines races considérées comme dangereuses : Appenzell Rhodes-Intérieures, Appenzell Rhodes-Extérieures, Berne, les Grisons, le Jura, Lucerne, Neuchâtel, Nidwald, Obwald, Schwyz, Saint-Gall, Uri et Zug.

Il y existe tout de même des lois sur les chiens, fixant des règles applicables à tous les individus quelle que soit leur race. Par exemple, la Loi sur les chiens du canton de Neuchâtel (LChiens/NE) prévoit qu’en cas de morsure, le service compétent peut imposer le port de la muselière dans l’espace public, voire ordonner la confiscation ou l’euthanasie de l’animal. Quant à la Loi sur les chiens du canton de Berne (LChien/BE), elle comporte une liste de pas moins de quatorze mesures susceptibles d’être prises dans le cas d’un chien qui en a blessé un autre ou un humain, qui présente un comportement agressif excessif, ou dont le propriétaire ne peut pas garantir sa détention sûre et responsable.

La réglementation suisse par rapport à celle d’autres pays

La législation suisse sur les chiens dangereux ressemble à celle de bien d’autres pays, même s’il existe bien sûr des différences.

Comparaison avec la France

Un Labrador se promenant au bord de la seine, à Paris

Contrairement à la Suisse, la France est un pays très centralisé. Ainsi, la réglementation sur les chiens considérés comme dangereux relève de l’échelon national. Elle ressemble toutefois fortement à celle adoptée par différents cantons de la confédération, tant en ce qui concerne la liste des races ciblées (au sein de laquelle on retrouve notamment l’American Staffordshire Terrier, le Pitbull et le Rottweiler) que l’existence d’un permis de détention.

Ainsi, la loi française sur les chiens dangereux adoptée en 1999 classe ceux-ci en deux catégories :

 

  • la première catégorie concerne les « chiens d’attaque » : cette appellation regroupe les individus sans pedigree dont la morphologie se rapproche de l’American Staffordshire Terrier (alors appelé Pitbull), du Mastiff ou du Tosa Inu. Ils sont interdits sur le territoire français mais il est possible d’obtenir une dérogation, notamment dans le cas d’une adoption auprès d’une association de protection des animaux ;

  • la seconde catégorie vise les « chiens de garde et de défense » : il s’agit des American Staffordshire Terriers, des Rottweilers et des Tosa Inus dotés d’un pedigree, ainsi que des chiens de type Rottweiler qui ne possèdent pas de pedigree. Leur commercialisation et leur détention est soumise à certaines conditions : pour posséder un tel chien, il faut notamment avoir obtenu une attestation d’aptitude et un permis de détention, lui faire passer une évaluation comportementale et souscrire une assurance responsabilité civile.

Comparaison avec la Belgique

Un chien passant la tête par la fenêtre dans une rue de Namur, en Belgique

En Belgique, il n’existe pas de loi au niveau national ou provincial interdisant la possession de certaines races de chiens.

En revanche, les communes ont la possibilité d’établir des règlements de police désignant certaines races comme dangereuses et imposant différentes obligations aux personnes possédant de tels chiens.

C’est le cas par exemple dans la ville de Namur, où treize races sont considérées comme potentiellement dangereuses - dont l’American Staffordshire Terrier, le Pitbull et le Rottweiler. Lorsqu’il évolue dans un lieu public ou dans un lieu privé accueillant du public, un chien appartenant à l’une d’entre d’elles doit y porter une muselière et être sous la surveillance permanente d’une personne majeure.

Comparaison avec l’Allemagne

Un Retriever de la Nouvelle-Écosse au bord de l'eau au lever du soleil

L’Allemagne possède une loi fédérale relative aux chiens dangereux. Intitulée Gesetz zur Beschränkung des Verbringens oder der Einfuhr gefährlicher Hunde in das Inland, celle-ci interdit sur l’ensemble du territoire l’American Staffordshire Terrier, le Bull Terrier, le Pitbull et le Staffordshire Bull Terrier, ainsi que les individus issus de croisements avec ces races.

En parallèle, les Länder ont toute latitude pour soumettre à autorisation la possession sur leur territoire d’une ou plusieurs races supplémentaires. Une douzaine sur seize ont effectivement décidé de le faire.

Comparaison avec l’Italie

Une femme en train de manger une glace et assise avec son chien près de la fontaine de la place Navone, à Rome (Italie)

La réglementation en Italie est très différente de celle de la Suisse, puisqu'aucune race de chien n’est prohibée. Le pays a édicté en janvier 2007 une loi semblable à celle de la France et de l’Allemagne, mais elle a été abandonnée dès 2009. En effet, on a alors considéré qu’elle n’avait eu aucun impact sur les attaques, et qu’il est impossible d’établir l’agressivité d’un chien en se basant simplement sur la race à laquelle il appartient.

Elle a été remplacée par des directives générales applicables à tous les maîtres et tous les chiens, quelle que soit leur race. Par exemple, l’Ordinanza contingibile ed urgente concernente la tutela dell’incolumità pubblica dall’aggressione dei cani de 2013 interdit notamment de posséder un chien dans le but de le soumettre à un entraînement destiné à stimuler son agressivité, de le doper, ou encore d’organiser un programme d’élevage visant à obtenir des individus particulièrement agressifs.

Comparaison avec les États-Unis

Un homme promenant son chien dans un lotissement

Il n’existe pas aux États-Unis de loi fédérale limitant ou interdisant la possession de certaines races. Par conséquent, la compétence sur le sujet relève de chaque État, qui a le choix de la déléguer ou non aux autorités locales : comtés, municipalités… Dans le premier cas, il laisse à ces dernières le pouvoir d’établir des règles en la matière.

Une vingtaine d’entre eux le font, si bien qu’il y existe effectivement dans certains comtés et certaines municipalités des réglementations locales ciblant tel(s) ou tel(s) type(s) de chiens.

Les autres en revanche (également une vingtaine, donc) ne veulent pas que de telles limitations existent sur leur territoire : ils interdisent donc à leurs collectivités locales de légiférer sur le sujet.

Comparaison avec le Canada

Le Canada laisse ses provinces libres de légiférer – ou non – sur les chiens dangereux.

Toutefois, seul l’Ontario a effectivement établi d’une liste de races interdites sur son territoire : l’American Staffordshire Terrier, le Pitbull et le Staffordshire Bull Terrier.

Les autres provinces (dont le Québec) font le choix de déléguer cette compétence à leurs villes. Il faut alors se référer à la réglementation municipale pour savoir si des restrictions existent à tel ou tel endroit (interdiction ou nécessité d’obtenir un permis de détention, port obligatoire de la muselière…), et le cas échéant connaître les types de chiens visés.

Les critiques à l’encontre des lois suisses sur les chiens dangereux

À l’instar de ce qu’on constate également dans d’autres pays, les lois suisses interdisant ou restreignant la possession de certaines races font l’objet de nombreuses critiques. Les opposants à ces législations soulèvent notamment que celles-ci sont fondées sur des arguments peu solides et sur des statistiques peu fiables. En tout état de cause, leur efficacité est contestable, tandis que les inégalités qu’elles créent entre propriétaires sont pour leur part évidentes.

Des interdictions sans réel fondement

Zoom sur le maillet d'un juge

De nombreux amoureux de la gent canine et experts sont d’avis que les chiens ciblés par les réglementations sur les races dangereuses ne sont pas agressifs et dangereux par nature, mais peuvent simplement le devenir en cas de défaillance dans leur éducation ou leur socialisation. Ils considèrent donc qu’il vaudrait mieux privilégier des mesures concernant les propriétaires eux-mêmes, et non leurs animaux.

Le Tribunal Fédéral suisse a plusieurs fois été saisi sur la question. Ce fut le cas notamment en 2006, à la suite de la mise en place de la Loi d’application de la loi fédérale sur la protection des animaux valaisanne (LALPA/VS). Plusieurs associations, dont l’American Staffordshire Terrier Club Suisse et le Doberman Club Switzerland, tentèrent en effet de faire annuler cette législation. Ils soulignèrent notamment que la liste des chiens interdits ne reflétait pas la réalité des agressions et morsures dans le canton. En effet, alors que les chiens de berger étaient responsables de nombreuses blessures, aucun d’entre eux ne figurait dans la liste, tandis que d’autres chiens pourtant moins mordeurs s’y trouvaient. À leurs yeux, ce type de loi est donc injuste. Le Tribunal fédéral n’a pas souhaité se prononcer, étant donné que ce sont les cantons qui sont compétents en la matière.

Des statistiques floues

Zoom sur plusieurs graphiques

Quand bien même les réglementations ciblant certaines races en particulier se fondaient strictement sur les statistiques de morsures et d’accidents disponibles, elles resteraient discutables. En effet, de nombreux spécialistes soulignent qu’il faut se méfier de toute interprétation hâtive à la lecture de ces dernières.

D’une part, parce qu’une majorité des morsures ont lieu lorsque l’animal a peur ou est stressé, et non par pure agression. Dès lors, affirmer que telle race mord plus qu’une autre parce qu’elle serait « naturellement » agressive n’a pas vraiment de sens.

D’autre part, le nombre de morsures en tant que tel ne veut rien dire : il faut dans tous les cas le mettre en relation avec la population de la race concernée. Comme le souligne notamment une thèse de doctorat publiée en 2002 par Ursula Horisberger et intitulée « Medizinisch versorgte Hundebissverletzungen in der Schweiz: Opfer, Hunde, Unfallsituationen », il est vrai que les Rottweilers mordent plus que d’autres races, en proportion de leur part dans la population canine suisse. Cependant, elle ajoute que les chiens de berger sont eux aussi sur-représentés : alors qu’ils représentaient à cette époque 12,8% de la population canine suisse, ils étaient responsables de 25,5% des morsures. Pourtant, aucun canton n’a décidé la moindre restriction à leur encontre.

Saisi par plusieurs associations et particuliers mécontents de la loi cantonale valaisanne, le Tribunal fédéral lui-même a considéré en 2006 qu’il n’existait pas de données statistiques fiables, quand bien même plusieurs lois cantonales sur les races de chiens dangereux avaient alors déjà été promulguées. Il a en effet déclaré dans son arrêt (ATF 133 I 249) que « l'interdiction absolue de certaines races de chiens et de leurs croisements, édictée par le Conseil d'Etat du canton du Valais, pourrait apparaître comme étant excessive, compte tenu de la responsabilité incombant en principe aux détenteurs de chiens, d'une part, ainsi que de l'existence de toute une palette de mesures moins restrictives, d'autre part. Nonobstant l'absence de données statistiques fiables, il est toutefois avéré que des chiens (y compris ceux appartenant à certaines races) peuvent provoquer et ont provoqué des accidents (extrêmement) graves, qui ont affecté non seulement d'autres chiens mais encore et surtout des personnes. De plus, certaines races de chiens sont susceptibles d'effrayer la population, créant ainsi un sentiment d'insécurité ». Autrement dit, il confirme la validité des lois cantonales visant certaines races de chien en particulier, tout en reconnaissant qu’elles ne reposent pas forcément sur des éléments tangibles – à commencer par des statistiques précises et fiables – et qu’il y aurait potentiellement d’autres façons d’aborder le problème.

Le Tribunal fédéral n’est pas le seul à considérer que les données sont insatisfaisantes : la même année, le criminologue et professeur à l’Université de Lausanne Martin Killias, interrogé sur la situation, soulignait lui aussi que la Suisse ne disposait pas de données suffisantes sur les morsures. En effet, les chiffres à disposition laissent à désirer : il est probable qu’ils soient sous-estimés du fait que de nombreux incidents ne sont pas recensés, et ils ne font qu’assez peu la différence entre une morsure superficielle et une blessure plus grave. En outre, le contexte de l’accident n’est pas toujours entièrement pris en compte : or, il n’est pas forcément pertinent de mettre par exemple sur le même plan un chien qui mord son maître car ce dernier le maltraite et un autre qui attaque un inconnu sans raison apparente. Le professeur estime que pour y voir plus clair, il faudrait « idéalement une statistique du nombre de morsures, hiérarchisées selon leur gravité et commises dans l’espace public en fonction de la durée que les chiens de différentes races passent à l’extérieur ».

Une efficacité contestable

Zoom sur une main ayant été mordue

S’il est évident qu’elles tendent à rassurer l’opinion publique, les réglementations sur les chiens dangereux ont une efficacité contestable.

Par exemple, la population de molosses enregistrés dans le canton de Genève a été divisée par quatre entre 2008 (année à partir de laquelle une quinzaine de races y ont été interdites) et 2015, passant de 583 à 137. En revanche, dans le même temps, le nombre total de morsures y a augmenté de 50 %.


Philippe Bocion, un vétérinaire et comportementaliste canin, souligne notamment dans une mise au point adressée en 2010 à la Revue Médicale Suisse que ce manque d’efficacité vient du fait que ce ne sont pas les vrais coupables qui sont visés par les réglementations cantonales. Évoquant les chiffres établis par les travaux de recherche d’Ursula Horisberger, il souligne que 90% des accidents par morsure nécessitant des soins médicaux sont occasionnés par des chiens qui ne sont ni des molosses ni des chiens de combat, et qui ne figurent généralement pas sur les listes de races considérées comme dangereuses.

De plus, ces interdictions promeuvent le trafic de chiens sur le marché noir et les importations illégales. En effet, certaines personnes déterminées malgré tout à posséder un chien interdit acquièrent ce dernier sur internet, dans un autre canton ou à l’étranger, puis l’introduisent illégalement sur le territoire du canton et ne le déclarent jamais – si bien qu’il n’a aucune existence légale. Cela n’est pas forcément sans conséquences sur sa santé et son bien-être. Par exemple, afin d’être discret, son propriétaire peut être enclin à limiter les sorties et/ou les consultations chez le vétérinaire. Il y a aussi des chances qu’il décide de ne pas faire identifier son chien, quand bien même cela est obligatoire ; dès lors, celui-ci risque de ne jamais être réuni avec son propriétaire si un jour il s’échappe.

Une inégalité entre les propriétaires

Un chien enlacé par son maître

La réglementation suisse sur les chiens dangereux étant fixée canton par canton, il existe parfois des différences énormes à quelques kilomètres d’intervalle. Cela crée d’indéniables inégalités entre propriétaires, en plus d'être source de complexité et de malentendus.

D'un point de vue pratique, il serait sûrement judicieux qu’une loi fédérale uniformise les réglementations. Néanmoins, malgré plusieurs tentatives de divers responsables politiques, le gouvernement suisse n’a jamais voulu légiférer sur le sujet, ne souhaitant pas enlever cette compétence aux cantons.

Conclusion

Les réglementations suisses sur les chiens dangereux marquent la primauté de l’échelon cantonal sur l’échelon fédéral, puisqu'elles sont définies en toute indépendance par chaque canton. Cela ne va pas sans engendrer une certaine confusion : si la moitié d’entre eux n’ont pas de loi visant certains types de chiens en particulier, l’autre moitié en revanche en possèdent, avec des dispositions parfois très différentes de l’un à l’autre.

Que l’on approuve ou non ces réglementations, qui sont contestées tant sur le principe qu’en termes d’efficacité, on est bien sûr tenu de les respecter. Que l’on vive en Suisse, que l’on s’y rende régulièrement ou qu’on y soit simplement de passage par exemple dans le cadre de vacances, il est important de bien se renseigner si l’on possède ou envisage d’acquérir un chien susceptible d’être ciblé par la réglementation, afin de savoir à quoi s’en tenir et d’éviter toute mauvaise surprise.

Par Delphine S. - Dernière modification : 02/19/2024.

Commentaires sur cet article

Il y a je crois plus a faire pour d'abord éduqué les personnes que les animaux .Quand aux chien il faut pour moi d'abord leurs faire passer des testes par des personnes professionnelle pour voir si le chien est dangereux ou pas .Il y en a qui ne ferait pas du mal a une mouche est qui sont dans la catégorie de chien dangereux .Est des autres qui sont dans des catégorie dit gentille est qui morde bien est vite .

   
Par pire

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