À l'origine, les chiens et les chats ne sont pas faits pour cohabiter. C'est l'Homme qui, en les domestiquant, a fait vivre ces deux espèces ensemble, parfois dans une grande promiscuité. Et ce n'est pas forcément pour le meilleur !
L'expression populaire "s'entendre comme chien et chat" parle d'elle-même et laisse sous-entendre que les relations entre les individus de ces deux espèces sont plutôt conflictuelles.
Mais les chiens et les chats s'entendent-ils vraiment si mal ? Certains sont pourtant les meilleurs amis du monde. Sur quoi repose alors leur paisible cohabitation ? Comment peut-elle se réaliser ?
La socialisation du chiot et du chaton est une étape très importante et primordiale pour une future cohabitation entre les deux espèces. Sans elle, les risques de conflit seront plus développés.
Le comportement de la mère à l'égard de l'autre espèce est important. Bien souvent, une chienne portera un regard bienveillant et protecteur sur un chaton, et inversement. D'ailleurs, un bon éleveur possède obligatoirement un représentant des deux races.
Chattes et chiennes ont un instinct maternel particulièrement fort. Lorsqu'elles mettent bas, elles sont capables de prendre en charge et d'élever, en plus de leur portée, des petits qui ne sont pas de leur espèce. C'est ainsi que l'on peut voir une chienne allaitant et bichonnant des chatons ou, à l'inverse, une chatte nourrissant un jeune chiot.
Même une chienne ne connaissant pas bien les chats peut tout à fait adopter des chatons. C'est particulièrement le cas si elle-même a eu une portée de chiots. Elle ne voit alors pas des chats, mais des êtres infantiles qu'il faut nourrir et protéger. L'inverse est également vrai.
Ce comportement a également été observé venant de chiennes n'ayant jamais eu de portées, mais ayant probablement été socialisées au chat. C'est l'instinct maternel qui prime alors sur les peurs ou les instincts de chasse. Les petits feront toujours partie de leur famille et seront défendus, même lorsqu'ils grandiront. Voir une chatte défendre le Rottweiler qu'elle a materné alors que celui-ci fait pourtant trois fois sa taille ne manque d'ailleurs pas de sel !
Il est intéressant de noter qu'un chaton orphelin, élevé et alimenté par une chienne, se comportera comme un chien. De même, un chiot abandonné, élevé et alimenté par une chatte se prendra pour un chat. De multiples expériences, notamment avec des Yorkshires, le prouvent.
Avoir été familiarisé à un chat ne signifie pas pour autant l'être à tous les chats. Un chiot peut gentiment câliner le chat blanc de la maison et se mettre à poursuivre et chasser un chat noir qui lui est inconnu. Surtout si celui-ci se met à courir, déclenchant l'instinct de prédation du chien. L'inverse est également vrai : un chat ayant été habitué à un Cavalier King Charles fuira peut-être de peur devant un Husky ou un Bull Terrier !
Cette différence de comportement devant l'animal inconnu s'explique par le fait que, si chien et chat sont tous deux des prédateurs de proies en mouvement, le chat chasse seul des proies plus petites que lui, alors que le chien chasse seul de petites proies ou, en groupe, des proies de sa taille ou même plus grandes que lui. De manière générale, un chat ne chasse que peu le chien, même si cela peut arriver (on peut voir un chat exercer ses talents de prédateur sur un petit chiot, au point de l'envoyer aux urgences vétérinaires), alors que l'inverse est différent. D'autant plus que certains maîtres encouragent l'instinct de poursuite de leurs chiens. Du coup, pour ces derniers, tout ce qui fuit devient une proie potentielle.
De plus, un chat reconnaît son ami chien à son odeur. Il peut communiquer avec lui par différents miaulements et vocalises, mais aussi par des postures ou des mimiques, comme du nez à nez, par allomarquage ou par un léchage mutuel. Il existe de telles différences entre les diverses races canines que le chat perçoit le chien comme un individu, plutôt que comme une espèce. En effet, comment peut-il conceptualiser les différents gabarits, faire la différence entre un petit et un grand chien, et comprendre que ces animaux si différents sont tous des chiens ? En revanche, pour le chien, la difficulté est moindre, car, mis à part les chats sans queue, ils se ressemblent tous plus ou moins.
C'est pour cette raison qu'il est important de présenter très tôt au jeune chien ou chaton, différentes races, comme il est important de lui faire rencontrer des humains différents : adultes, âgés, enfants, bébés, de couleurs de peau et de morphologie différentes... Tout cela lui permettra d'aborder plus facilement son environnement à venir. Et un chat doit apprendre à ne pas courir à proximité d'un chien, au risque de déclencher une poursuite. D'autant plus qu'un chat poursuivi dans la maison peut casser des objets de valeur.
Pour une bonne cohabitation entre chiens et chats, la socialisation est donc très importante. L'idéal est qu'elle se fasse chez l'éleveur, afin que le chaton soit habitué au chien et inversement. Tout s'apprend, et il ne faut pas attendre pour faire vivre au chiot ou au chaton de multiples expériences.
Cela ne dispense cependant pas de poursuivre - et si possible de renforcer - cette socialisation (par des rencontres et des interactions) tout au long de son adolescence et au moins jusqu'à l'âge de 2 ans, même si l'on ne souhaite pas avoir de chat ou de chien dans l'immédiat. En effet, cette imprégnation envers une espèce différente n'est pas garantie à vie, surtout chez le chat. Pour cette raison, il faut entretenir la mémorisation des espèces amies en ravivant régulièrement la mémoire du chat durant sa vie adulte. Cet entretien n'est pas toujours réalisable, car il faut organiser des rencontres avec des chiens parfaitement sociabilisés à l'espèce féline, mais il est important.
Malheureusement, la sociabilisation d'un animal peut se limiter à un contexte donné, et il n'est pas rare qu'un chien et un chat cohabitent sans heurts dans la maison, mais voir le chien reprendre ses instincts et courir après le chat dès qu'ils se croisent dans le jardin.
La socialisation du chiot est une période qui s'étend de la 2e a la 12e semaine (jusqu'à la 16e semaine pour certaines races de chiens géants). Chez un chaton, elle se déroule les 9 premières semaines de sa vie.
C'est un moment ou l'attraction sociale est forte et ou le petit est curieux de ce qui l'entoure, s'y habitue et s'y attache. Ainsi, si un chiot ou un chaton naît dans un milieu ou vivent déjà (ou sont introduits) des humains, d'autres chiens, d'autres chats ou d'autres animaux, il y sera habitué et sera socialisé. Cela signifie, entre autres, qu'il n'identifiera pas ces animaux comme des espèces ennemies ou des proies potentielles, mais bel et bien comme des espèces amies.
C'est le moment le plus propice pour le préparer à tout ce qu'il sera amené à rencontrer dans sa vie future. Cela lui permettra de faire facilement face à divers modes de vie et à de multiples espèces animales.
Tout le vécu de cette période est gravé pour la vie et aura des retentissements sur le futur comportement de l'adulte. Le but est donc que toute découverte soit vécue agréablement, et que toute rencontre soit joyeuse et amicale. Car si un chiot ou un chaton venait à faire une trop mauvaise expérience avec un autre être vivant durant ces quelques semaines, il serait bien difficile d'en effacer le souvenir. Un long travail de patience serait alors nécessaire pour désensibiliser l'animal, sans complète garantie d'y parvenir. Ces mauvais souvenirs peuvent aller jusqu'à déclencher des peurs qui semblent irrationnelles aux personnes non averties : peur d'un "simple chat", d'un balai, d'une poussette... Cela peut, en outre, conduire à du stress chez le chat et à des problèmes de malpropreté féline.
Pour favoriser la cohabitation entre un chien et un chat, l'introduction du nouvel arrivant doit être faite doucement. Il faut aussi prendre en compte les expériences passées des animaux, surtout si elles sont négatives.
Chez les deux espèces, le sens olfactif est important. Il est donc recommandé d'utiliser un bout de tissu que l'on place chez le futur pensionnaire, chez l'éleveur. L'objectif est de présenter la maison, en associant une friandise ou un jouet à l'odeur du futur foyer.
Il est aussi possible d'isoler le résident physiquement et psychologiquement, c'est à dire de pas s'occuper de lui pendant un ou deux jours.
Il est souhaitable que la première présentation se déroule dans un lieu sécurisé et neutre, offrant une possibilité d'échappement au chat (un meuble, un arbre...). Elle peut se dérouler dans la salle de jeux des enfants, dans un grand garage, dans un jardin...
Dès que le nouveau apparaît, il faut offrir quelque chose d'agréable et caresser le résident sans s'occuper du nouveau venu. Dans le cas du chiot présenté au chat, quelqu'un retiendra le chiot avec une petite laisse pour que l'approche ne soit pas précipitée. Si, à l'inverse, c'est un chaton qui est présenté au chien adulte, le maître incitera son chien à de la modération : "Non ! Pas toucher !".
Il faut laisser le chat poser ses limites et ne jamais le forcer à un contact. C'est souvent le chat qui donnera le rythme à la progression de cette cohabitation. Ainsi, essayer de forcer les choses en obligeant un chat à être proche d'un chien ou à se laisser sentir par le chien ne fera qu'envenimer la situation.
Un chat habitué aux chiens se contente de hérisser le poil, mais n'attaque pas. Il ne fuit pas non plus ; il attend. En général, ce comportement freine l'agression et le contact va se transformer, pour le chien, en exploration par le flair.
Un chat qui a essuyé des attaques douloureuses ou une chatte qui vient de mettre bas ne réagiront pas de la même façon. Ils se prépareront à l'attaque. Le regard se rétrécit, les pupilles se dilatent et les oreilles se rabattent en arrière. Le chat feule, les babines retroussées, prêt à cracher si l'approche se précise. La queue se dresse, gonflée et agitée de saccades, et le poil est hérissé pour se grossir davantage et tenter d'impressionner. L'attaque sera portée latéralement et sera très rapide. Il se laissera tomber sur le dos et ramènera très haut les pattes arrières pour labourer le ventre de l'adversaire.
En général, si le chien hésite, les yeux du chat, qui cherchaient déjà une direction de fuite, vont le trahir et il va s'échapper très vite pour se mettre hors de portée. Ce n'est toutefois pas le cas pour les chats ayant de l'expérience et pour les mères ayant leur progéniture a proximité.
Il faut tout faire pour limiter les situations conflictuelles ou susceptibles de le devenir. Par exemple, le repas ne doit pas être servi au même endroit et, si le jeune chien a un os, on empêchera le chat d'aller le renifler avec intérêt. Il est également idéal que le chat mange en hauteur et le chien au sol, pour éviter les conflits autour de l'alimentation.
On pense bien souvent que plus le chien est gros, plus le chat en aura peur. C'est vrai lorsque le chat n'est pas socialisé aux chiens, mais on peut tout à fait faire cohabiter de petits chats avec des chiens de grand gabarit, dès lors qu'ils ont grandi ensemble. Le principal n'est pas la taille, mais bien le comportement du chien. Or, les molosses, malgré leur mauvaise réputation, ne sont pas les chiens les plus hargneux ni plus excités.
Les attitudes des maîtres dans ces différentes mises en présence sont capitales. Suivant que l'on fait se rencontrer des individus de ces deux espèces, adultes ou jeunes, socialisés précocement ou non, les risques sont variés. La peur de voir "le gros" (chat ou chien) griffer ou mordre "le petit" est légitime : le danger peut être réel. Le chat peut griffer sérieusement le chien, voire lui crever un oeil. Quant au chien, il peut tuer d'un coup de dent, surtout s'il s'agit d'un grand gabarit ou de certains terriers vindicatifs. Il est donc important que les maîtres soient attentif à leurs animaux lorsqu'ils se rencontrent.
Avant d'introduire un chat ou un chien dans le foyer, il est fortement recommandé d'estimer le degré de socialisation et la capacité d'adaptation à l'autre espèce des deux animaux. Ce n'est donc ni la race de chien ni le gabarit qui doivent être retenus pour le choix d'un chien, mais bien le comportement de l'individu. En effet, un grand chien peut se montrer calme et doux, alors qu'un petit chien peut être très excité par la présence du chat. Plus que pour toute autre adoption, il est idéal de se renseigner auprès de l'éleveur afin d'effectuer le meilleur choix du chiot à adopter au sein de la portée.
Il en est de même pour le choix d'un chat à adopter. Il n'existe pas de race de chat idéale pour réussir une future cohabitation ; il s'agit plutôt de choisir un individu qui a les capacités requises et optimales pour s'assurer un grand taux de réussite.
Introduire un chiot auprès d'un chat adulte est tout à fait envisageable. Celui-ci aura le temps de s'habituer avant que le petit ne grandisse et n'aboie suffisamment fort pour l'effrayer. L'important est de laisser le chat poser lui-même ses limites au chiot turbulent, ainsi que la possibilité de s'isoler comme il veut.
En revanche, introduire un chaton auprès d'un chien qui n'a pas été familiarisé au chat peut s'avérer plus difficile. Il y a intérêt à ce que le chien soit bien sous le contrôle de ses maîtres, et à faire appel à un comportementaliste pour aider.
Introduire un chien adulte auprès d'un chat lui aussi adulte est une opération bien plus difficile encore. Cependant, si le chat a été correctement socialisé à un grand nombre de stimuli et que, globalement, il n'est pas peureux, alors il y a un espoir. Encore vaut-il mieux lui présenter un chien particulièrement calme et doux dans ses gestes et déplacements, pour qu'il puisse s'y habituer lentement, jusqu'à ne plus le craindre.
La cohabitation entre un chien et un chat n'est pas impossible, loin de là ! Ils peuvent même s'entendre et s'apprécier.
La clé est une socialisation dès le plus jeune âge. De plus, l'intégration du nouvel arrivant doit se faire doucement, en préparant les deux animaux à leur future cohabitation. Les difficultés de cohabitation rencontrées étant diverses et variées, les solutions ne peuvent être appliquées qu'au cas par cas. Et même avec une bonne préparation, il ne faut pas oublier qu'avec tout être vivant, rien n'est jamais 100% garanti. Les apprentissages sont parfois longs, il ne faut donc pas que les maîtres soient trop pressés ni trop pressants, et exiger une entente parfaite dès le départ. Certains animaux s'ignoreront, d'autres se rapprocheront ; à chacun ses affinités et son rythme.
Pour autant, pour les chiens plus difficiles, un comportementaliste canin devrait apporter une aide précieuse.
De plus, le fait que les propriétaires du chien soient parvenus à instaurer un bon mode relationnel avec leur animal peut permettre d'avoir un contrôle sur celui-ci. Pour autant, ils ne doivent pas oublier qu'un chien qui cohabite avec un chat dans la maison n'aura peut-être pas le même comportement avec les autres chats. Tolérer le chat de la maison ne veut pas dire tolérer tous les chats...
Enfin, si l'animal de la maison n'est vraiment pas prêt à accueillir un compagnon d'une autre espèce, le mieux reste de ne pas en adopter.